Une législative pas comme les autres : Quand Mouyondzi, l’éternelle marginalisée, braille et tonne « Puss’ Kuni » !

« La première raison de la servitude volontaire c’est l’habitude…soyez résolus à ne plus servir et vous voilà libres… Les tyrans ne sont grands que parce que nous sommes à genoux » (Etienne de la Boetie)

Une collectivié locale parmi les plus dynamiques et autosuffisantes du pays, abandonnée à elle-même, quasiment marginalisée à plusieurs égards depuis un quart de siècle, et qui peu avant une législative dépourvue de tout intérêt objectif en raison de la nature despotique du régime établi, fait l’objet d’une focalisation et d’une mobilisation inhabituelles et incompréhensibles par le pouvoir !

Cela était suffisamment insolite, et majestueusement hypocrite, pour autant réveiller les originaires de ladite collectivité, banaliser l’événement national de même nature mais sans suspense parce que toujours fabriqué et truqué, que finalement captiver toute l’attention nationale sur ladite collectivité.

Cette collectivité, c’est Mouyondzi, au sud ouest du pays, dans la Bouenza, et dont un observateur averti, Georges Dupré, sociologue et géologue français, brossait, laconiquement, dans un ouvrage original et dense, le portrait suivant : « Travail et prospérité, les mots sont là et ne sont point trop forts pour qui a parcouru le reste du Congo. Pourquoi alors ce travail et cette relative prospérité ici et pas ailleurs ?», finissait-il par s’étonner (in « Les naissances d’une société. Espace et historicité chez les Beembé du Congo », Éditions de l’ORSTOM, 1985, page 11).

Une collectivité qui, tout au long de son histoire, ou de l’histoire du pays, a toujours pris position, affirmé son originalité et ses valeurs pour des choix nobles. C’est ainsi, rappelle l’auteur, que « Par sa résistance il mit en échec le dessein du colonisateur. Les Beembé ne se contentèrent pas de réagir à la domination qui leur était imposée ; ils lui assignèrent des limites à ne pas dépasser » (p.12).

C’est dans le même esprit que lors du premier grand rendez-vous des élections postcoloniales disputées de 1992, ils jetèrent ouvertement, et passionnément, leur dévolu pour le candidat à la présidentielle Pascal Lissouba qui, contrairement aux démons qui sévissent en milieu africain, n’était ni de leur communauté culturelle intrinsèque, ni de leur région administrative et géographique, mais qui répondait à leurs valeurs sociales enracinées et clairement affirmées, celles du travail, du dynamisme, de l’excellence, de l’honneur et de la dignité. Sans, curieusement, que par un subjectivisme pervers, cela n’empêche certains d’y voir et d’y coller leurs propres représentations irrationnelles.

Plus précisément, et en raison de la rupture brutale et sanglante du régime démocratique, de la conquête sauvage du pouvoir par Sassou Nguesso en octobre 1997, celui-ci leur manifestera toute sa haine, jusqu’à l’envoi d’une expédition militaire étrangère, celle des angolais, au printemps 1999, avec de lourdes conséquences humaines. Haine qui, la situation maitrisée et le pouvoir assis, sera remplacée dès les années suivantes par une froide et radicale diète de toute assistance administrative et étatique, une marginalisation, une brimade de ses ressortissants, un sévère aparteid territorial et ethnique, économique et autres, qui ne commenceront à se desserer que plus de deux décennies après son retour criminel aux affaires. De telle sorte que, des différents booms pétroliers que le pays a connus, la collectivité de Mouyondzi n’y aura perçu, globalement, qu’écho et odeur !

A posteriori, et principalement en raison de tout ce qui a semblé être entrepris quelques mois avant ces dernières législatives, notamment la construction d’un établissement de formation des enseignants dans l’enceinte du lycée local, et concomitamment le pointage d’un candidat à la députation originaire de la localité mais sous le label du PCT (parti au pouvoir), le discours qui a accompagné cette candidature, celui de la promesse d’aider enfin au soutien du développement de la localité, se confirme un calcul, une démarche bien typiques à ce parti : le chantage cynique dont il est expert depuis toujours !

En effet, on reste stupéfait, quand on sait à quoi sert universellement un député, avec un statut représentatif national et non impératif, qu’ait  été associé à la campagne législative locale, le discours ou la promesse d’aide à l’installation de plusieurs infrastructures de base, dont celles de  l’eau, dont  est dépourvue cette collectivité, tout en étant enlassée par de grands cours d’eau ! De surcroit, et en l’occurrence, quand on sait que ce parti s’était comme toujours déjà assuré d’une majorité écrasante depuis le premier tour, et par des mécanismes indécents ( notre analyse : « Congo : au paroxysme du coubertinisme électoral », in Mediapart, 17 septembre 2017).

Non dupes, les habitants de Mouyondzi ont répondu par un clair  ‘Non‘, assorti d’un vigoureux ‘Puss’ kuni‘ (casse-toi), ne laissant ainsi au sinistre parti que la seule possibilité de s’imposer par la force, qui est sa grande et historique marque de fabrique ! Une attitude détonante au regard du choix de la résignation, de la servitude volontaire depuis fait dans l’ensemble du pays par les Congolais, contraints par le feu des balles chaque fois qu’ils ont refusé d’obtempérer. Ce qui a autant étonné la communauté nationale que cassé une pratique, une soumission qui perduraient, ouvrant les portes à une nouvelle page, à de nouveaux épisodes bourrés d’incertitude !

Sans rompre, pour le moment du moins, avec l’État et la communauté nationale, les populations de Mouyondzi, par la reminiscence de ce qu’ils ont toujours été dans leur histoire, dans les moments sensibles, ont vigoureusement affirmé, chants et balka conjugués, tout le long du processus électoral, qu’ils avaient fait leur résilience lors de la longue marginalisation qui leur a été imposée, que la dignité et l’honneur ne se transigent pas, n’ont pas de prix, et ont résisté. Cela par une philosophie et des mécanismes en eux enfouis, par des activités de toujours, dont celles liées à la complicité avec la nature et la terre, qui insufflent confiance en soi, assurance, courage, dignité, désinhibition, face aux pressions et intimidations diverses, face aux chantages multiformes. « Nous ne pouvons pas, n’avons jamais cédé notre terroir pour des sous », n’ont-il cessé de chanter gaiement ! Indignez-vous, résistez et assignez des limites à ne pas dépasser, lancent et braillent-ils, indirectement, à l’endroit des concitoyens d’autres localités !

Comment y sont-elles arrivées !

C’est, sans doute, l’occasion de rendre ici et en l’occurrence hommage à la présidente du MUST, Claudine MUNARI, fille du terroir, sa symbiose avec celui-ci, à sa vaillance et son engagement, à son indépendance et ses intuitions, à sa complicité avec les populations locales et dont on ne peut objectivement pas soutenir qu’ils n’y ont été pour rien dans cette issue, par des risques pris, et qui sont loin d’être terminés, dans un environnement violent où, pour exister poitiquement, même sans moyens pour porter ombrage au pouvoir dictatorial, des concessions vous sont inévitablement imposées, à commencer par la reconnaissance du pouvoir illégal et illégitime. Et ce n’est pas que cela, puisque cette concession est inséparable de plusieurs autres chantages et caprices, dont ce pouvoir est expert…

La séquence législative locale, elle, est apparemment close puisque, si, non dans le champagne mais dans le ntsamba et le grand balka local, authentiques bio énergisants, s’est fêtée la victoire, la concurrente malheureuse, non moins inspirée, à l’image de Ségolène Royal à la présidentielle française de 2007, et fair-play en dernière instance, s’est offerte avec ses soutiens « La défaite en chantant » (selon l’ouvrage fort ironique du Pr Claude Alègre, Plon, 2007), appuyée les jours suivants d’une lettre-hommage aux Mouyondziens et à son adversaire électoral, pour effacer définitivement l’équivoque qu’avait suscité cet échec dans la joie. La démocratie locale, peut-on dire, semble avoir gagné mais, indiscutablement, la politique elle, n’a fait qu’appuyer sur pause.

C’est tout cela, ce contexte que nous avons essayé d’esquisser dans cet interview…

 

7 thoughts on “Une législative pas comme les autres : Quand Mouyondzi, l’éternelle marginalisée, braille et tonne « Puss’ Kuni » !

  1. 15 AOÛT 2022: LE CONGO EST COUCHÉ, SASSOU NGUESSO DEBOUT, ON FAIT COMMENT POUR LE COUCHER AUSSI?
    En thermodynamique, l’entropie, nous décrit donc le monde des causes et des conséquences. En effet, la matière qui nous entoure a tendance à se désagréger – elle a tendance à se déstructurer entre l’ordre et le désordre. Par exemple, si vous prenez Denis Sassou Nguesso et que vous le laisser 40 ans au pouvoir – il y a des fortes chances que vous n’aurez jamais un pays émergent avant 2025. Et pour cause, l’émergence découle d’abord du niveau d’éducation et de formation professionnelle hautement qualifié dans une nation ou société donnée. explications: https://www.youtube.com/watch?v=Fici1Hdspt8

  2. L’IDIOT sassou ´N’EST QUE L’OBJET PAR LEQUEL LE BLANC MAL ÉDUQUÉ ESSAIE DE TE DIVERTIR. LE CONGOLAIS N’EST PAS COUCHÉ. FACE À LA BARBARIE OCCIDENTO-ORIENTALE, LE 15 AOÛT NE PEUT PLUS ÊTRE CÉLÈBRE COMME UNE DATE SPÉCIALE TANT QUE L’IDIOT sassou ET LE fcfa INFLUENCENT NOS ACTIONS.
    SENSIBILISEZ, CONSCIENTISEZ ET MOBILISEZ POUR LA LIBERTÉ DE VOS ENFANTS.

  3. Grand Merci pour cette brilklante interview.
    Sassou Nguesso qui règne illégalement depuis prés de 40 ans sur la destinée de la République du Congo et qui voue une haine viscérale à l’endroit des communautés ethniques du Sud du pays est une poubelle. Il n‘ a jamais gagné aucune élection. Sassou Nguesso organise des élections truquées et se désigant personnellement, en nommant les députés , les chefs de l’armée tribale.Il est un homme qui serait resté un rien si le hasard ne l‘ avait pas conduit vers Ngouabi, l’autre personage que des gens mals intentionnés avaient donné la présidence, le pouvoir.Sassou Nguesso est la véritable honte du Congo et de l‘ Afrique. Régime de Sassou Nguesso constitue le plus grande dictature de l’Afrique , du monde.Sassou Nguesso,son fils Christel,; le plus grand auteur des Biens Mal Acquis et clique du PCT sont les véritables destructeurs du Congo. SassouNguesso tribaliste à outrance a tué tant de Congolais. Il a détruit tant l’économie et la vie sociale des Congolais. Et s‘ il arrivait à mourir aujourd‘ hui, ceux des Congolais qui pleureraient sa mort sont des véritables hypocrites ou idiots. Sassou Nguesso est auteur des guerres, ,des crimes de génocide, des crimes contre l’humanité. Sassou Nguesso et sa famille, sa clique qui détournent l’argent du pétrole, l’argent des Congolais qu’ils rendent malheureux, doivent sans autre forme de procès écartés du pouvoir. Congolais réveillez vous! Réveillez vous! Seule la lutte libère.

  4. Toujours un immense plaisir de vous suivre tres cher Professeur. Sassou ne peut pas gagner une election et recourt a la force pour conquerir et maintenir le pouvoir. La seule personne qui ne le savait pas apparemment, c’est Lissouba qui l’a laisse faire. Erreur fatale.

  5. CONSCIENCE DU DEVELOPPEMENT ET DEMOCRATIE : La paix sociales par la régionalisation (Pascal Lissouba)Cet exposé du Prof Pascal Lissouba est en soi brillant. Mais le problème du Prof Pascal Lissouba brillant homme de science a été de pas savoir rimer la théorie à la pratique.
    Il est judicieux de le dire sans fausse modestie que le Prof Pascal Lissouba n’a pas été un bon chef d’état à la hauteur de la lourd devoir qui lui était confié.
    Il manqué de pramatique dans l’action politique, Il a certes été un bon premier ministre, un bon excécutant sous le président Massamba Débat. Mais entant que chef d’état à son tour, il n‘ a pas été concrétement à la hauteur de l’action politique et n‘ a pas aller contre les pièges qui lui été tendus. A cause de son impulsivité, naïvete ,le peuple Congolais paie un lourd tribut. Et un pion de l’impérialisme, un saboteur, un énnemi de la république en la personne de Mr Sassou Nguesso a pu revenir au pouvoir et le confusquer dans la dictature sanguinaine jusqu’à nos jours. Et cela est vraiment regrettable

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