Assassinat du Commandant Marien Ngouabi : Le rôle de la France et d’Elf-Erap

Dans cette histoire dramatique qui a endeuillé de nombreuses familles congolaises, les documents montrent que la France et Elf-Erap avaient déjà à l’époque, armé les commanditaires. Voici l’une des clefs décisives de l’assassinat de Marien Ngouabi, l’application des recommandations de la Conférence de l’OPEP de Quito, tenue le 17 juin 1974.

Principaux protagonistes du drame :

  • Pour le Congo :

Denis Sassou Nguesso, Ministre de la défense et patron des services

Rodolphe Adada, Ministre des Mines et de l’énergie

Henri Lopes, Ministre des finances et du commerce

  • Pour la France :

Valery Giscard D’estaing, Président de la République

Olivier Stirn, Ministre de l’Intérieur

Yvon Bourges, Défense

Marcel Bigeard, Secrétaire d’Etat à la défense)

André Tarallon, Elf Aquitaine

 

ELF Congo à l’épreuve des recommandations de l’OPEP

La production pétrolière congolaise de la décennie 1970 ne croît pas. Émeraude n’atteint toujours pas 2 millions de tonnes et Pointe Indienne baisse à 8000 tonnes. Cela signifie des réductions importantes au budget de l’État. Le gouvernement prend alors la décision le 19 février 1976 d’aligner le paiement de la redevance et de l’impôt, pour les années 1975 et 1976, sur les dispositions arrêtées par l’OPEP (Organisation des pays exportateurs de pétrole). Les pays de l’OPEP répliquent le 15 octobre 1973 à la politique américaine au Moyen-Orient en diminuant la production pétrolière de 5 %, et en augmentant de 17 % le prix du brut et de 70 % les taxes diverses exigées des sociétés pétrolières. Le pétrole devient une arme stratégique durant la guerre qui oppose les pays arabes à Israël.

Quand la Conférence de l’OPEP de Quito, tenue le 17 juin 1974, décide de porter de 12,45 à 14,50 $ le taux des redevances, le Congo saisit cette occasion pour entamer des négociations avec ELF Congo et AGIP Recherches Congo en vue de l’application de ces recommandations. Aussi, la nouvelle redevance minière est-elle adoptée, tandis que le prix de vente du baril est porté de 9,5 à 10,13 $ à compter du 1er janvier 1974. Le pétrole trop lourd d’Émeraude ne peut se vendre plus cher. Pour 1974, la redevance minière et l’impôt sur les sociétés représentent en tout 13,7 milliards de Fcfa qu’ELF Congo doit verser à l’État. Le gouvernement congolais estime qu’ELF Congo ne fait pas suffisamment d’efforts pour l’aider à combler le déficit de ses finances en cette année 1975 où la Révolution vient de se radicaliser et où le deuxième plan triennal doit entrer en action. Le gouffre financier est énorme. Les espoirs que la manne pétrolière avait suscités s’amenuisent donc en même temps que la production pétrolière. C’est la faute du capitalisme, en l’occurrence français, et de ses « valets » locaux, aiment à le dire les responsables politiques.

Le 5 février, le ministre des Mines et de l’Énergie dénonce purement et simplement les conventions d’établissement des sociétés ELF-ERAP et AGIP et met fin, le 13 février 1976, aux contrats d’association conclus le 28 avril 1969 portant sur le croisement d’intérêts de leurs filiales congolaises respectives pour l’ensemble des permis qu’elles détiennent au Congo. Les nombreuses réunions des mois de février et mars qui suivent ces décisions parviennent à mettre en place deux commissions, l’une financière et économique et l’autre technique, chargées de déterminer les raisons de la baisse de la production pétrolière et les décisions à prendre pour régler le différend fiscal.

Leurs résultats ne seront jamais publiés. Entre-temps, les sociétés mères, ELF-ERAP et AGIP, adressent une lettre au ministre des Mines et de l’Énergie lui rappelant les conditions dans lesquelles elles s’étaient engagées au Congo et condamnant la dénonciation qui mettait fin à la situation contractuelle existante.

Il convient de rappeler que les conventions d’établissement stabilisent, pour une période de 25 ans, les taux d’imposition et la redevance minière qui sont la garantie voulue par les organismes financiers qui accordent des prêts permettant d’assurer les activités d’exploration et de production des sociétés pétrolières. Suite aux décisions du gouvernement, le financement des opérations est donc arrêté. La situation peut devenir compliquée et très coûteuse par la suite s’il n’y a pas déblocage rapide. En attendant, pour garantir les échéances d’Émeraude, par exemple, ELF Congo doit recourir à la politique d’avances sur les chargements pétroliers auprès de l’acheteur du brut congolais.

Les négociations se poursuivent mais elles portent sur l’avenir des relations entre le Congo et les sociétés pétrolières. Elles sont axées essentiellement sur deux points. Le premier est un projet d’accord qui prévoit une cession réciproque d’intérêts devant conduire ELF Congo à s’associer à Hydro Congo sur l’ensemble de ses permis et concessions. Hydro Congo a été créée par ordonnance du 4 juin 1973 comme Société nationale chargée d’intervenir, pour le compte de l’État, directement ou en association avec des partenaires étrangers, dans toutes les activités de mise en valeur des richesses du sous-sol national congolais. Le second projet concerne une nouvelle convention qui s’appliquera à l’exploration et à l’exploitation des gisements à découvrir.

Mais, jusque-là, les investissements demeurent gelés, les dispositions juridiques qui permettent la poursuite de la coopération entre les différentes parties restant toujours suspendues. Le Congo ne cesse de voir s’assombrir son avenir, poussant le président Ngouabi à accuser ELF-ERAP d’être de mauvaise foi dans l’application des lois de l’État.

Guillaumat loue les efforts déjà consentis par son groupe et reste sourd aux appels au secours du gouvernement congolais pour l’aider à respecter ses obligations budgétaires. En vue de rendre possible le versement des salaires des fonctionnaires, l’État français et d’Omar Bongo du Gabon auraient renfloué momentanément les finances congolaises.

Tâchant de dénouer tout de même la crise, les dirigeants d’ELF-ERAP obtiennent une audience avec le chef de l’État le 11 mars 1977 au cours de laquelle il est décidé de reprendre les négociations à Paris à partir du 15 mars. Pendant leurs travaux du 18 mars, les négociateurs congolais, dirigés par le ministre de Mines et de l’Énergie Rodolphe Adada et le ministre des Finances et du Commerce Henri Lopes, et ceux d’ELF-ERAP, sous la direction de Tarallo, apprennent l’assassinat de Ngouabi, le jour même. Les négociations s’arrêtent net pour être reprises par le nouveau pouvoir, le Comité militaire du Parti (CMP), installé à Brazzaville. La présidence du colonel Joachim Yhombi-Opango (1977-1979) est placée sous le signe du pragmatisme et de l’amélioration des relations avec la France.

Source : https://www.cairn.info/revue-histoire-economie-et-societe-2010-2-page-109.htm

Rappel, la conférence nationale souveraine avait déjà désigné le principal assassin du Président Ngouabi

 

1 thought on “Assassinat du Commandant Marien Ngouabi : Le rôle de la France et d’Elf-Erap

  1. Je voudrais remercier Isidore Aya Tonga et Me Moudileno Massengo pour leur modeste témoignage dans les affaires Marien Ngouabi, Emile Biayenda, Massamba Debat et leur conséquences sur la cohésion sociale et politique au Congo. Je crois qu’Isidore Aya Tonga a bien raison de rappeler les congolais que Sassou Nguesso a egaré dans la phrase  » Bakongo babomi Marien Ngouabi » et qui continuent à la réciter comme si effectivement cette pharse a bien eu des effets dans la suite des évènements qui s’en sont suivis. 42 ans après ces crimes odieux, je pense, on pouvait bien avoir les idées claires et sans ambiguité sur cette phrase qui rejoint effectivement les inepties de Mr Sassou Nguesso dans son « discours  » de Mikalou au sortir de la guerre de 1997 quand il dit, s’il venait à mourrir à 11h avant meme la fin de l’après midi, les nordistes seront décimés par les sudistes. Oui depuis 1997, jusqu’aujourd’hui, soit 21ans, les nordistes en question ne meurent pas de faim et de maladie comme leurs frères du sud à cause du système pervers mis en place par Sassou Nguesso? A moins que l’on nous dise que les nordistes c’est le clan sassou nguesso! Bref, pour revenir sur la phrase  » Bakongo babomi Marien Ngouabi » , la prétention de Sassou Nguesso c’était avoir le même effet de l’affaire mbeti/ kouyou en juillet 1976. Isidore Aya Tonga dit la vérité à cette occasion en tout cas les gens du nord n’ont pas voulu entrer dans ce jeu de Sassou Nguesso. Dans son village Mouali, il y avait cet enseignant lari perdu dans les forêts et savanes et plaines du nord congo dont la vie n’a pas été mise en danger par les populations de ce village. Curieusement aussi à Owando, ville natale de Marien Ngouabi aucun citoyen congolais « bakongo » n’a pas été torturé, ni assassiné en signe de vangeance du président assassiné, Ils étaient nombreux, à owando capitale de la région de la cuvette, certains sont encore vivants ils peuvent le témoigner. Pour dire que les congolais nordistes souvent abusivement accusés savent bien faire la part des choses, Dans un livre écrit par Patrice Yengo, bien qu’il rappelle cette malheureuse phrase mise sur les pleurs de la cousine du président à poto poto, il fait tout de meme une précieuse incise rapportant les propos de maman Mboualé, mère du président Ngouabi, après l’assassinat du Cardinal Emile Biayenda. Maman Mboualé souligne Patrice Yengo considérait Ngouabi et Biayenda comme ses deux fils. Ainsi quand Emile Biayenda est assassiné, elle s’était effondrée en pleurant et disait en tuant le cardinal c’est comme ils ont tué mon deuxième fils et qu’est ce que je vais devenir ?Il faut rappler que la mère de Marien Ngouabi renconrait personnellement le Cardinal lors de ses sejours à Owando quand il venait pour ses activités religieuses à l’Evêché d’Owando. Comme catholique maman Mboualé, vivant à zero métre de l’Eglise d’Owando partait à la messe et dans ces circonstances recontrait facilement l’Archéveque de Brazzaville. Si une vielle femme du village comme celle là, n’ayant pas été à l’école du blanc pouvait bien faire la part des choses au moment meme des faits comment les congolais continuent ils de s’accrocher au mensonge de Sassou Nguesso comme un chien qui ne lache pas l’os du singe?
    Me Moudileno Massengo est bien précis pendant qu’un couvre feu est instauré dans la ville et que le cardinal Biayenda soit enlevé et assassiné sur la route du nord, ceux qui ont instauré ce couvre feu ne sont ils pas responsables de ce drame? Certes les jeunes kouyous ont été trainés dans ce drame, il faut le dire pas par la famille ngouabi encore moins par les kouyous mais par Sassou Nguesso qui avait peur que le cardinal donne sa version des faits. Et on sait que certains jeunes après ce meutre crapuleux ont eux aussi été passés aux armes pour ne pas dire qui les a envoyés. Ces jeunes ont été utilisés comme le général Garcia, homme de main de Sassou Nguesso et assassin des capitaines Kimbouala Kaya et Kikadidi. Pourquoi ne met on pas aussi en valeur ces crimes de de l’actuel général Garcia?
    Pour terminer, je voudrais que les congolais qui connaissent bien la vérité sur cette affaire puissent éclairer sériesment les compatriotes à travers les réseaux sociaux qui n’est plus le temps de « Mwety » et « Etoumba » deux organes de presse de perversion, encore moins des dépeches de Brazzaville ou le choc et bien d’ autres organes de meme acabit, Yomby Opango, Louis Sylvain Ngoma, Jean Pierre Ngombe et bien d’autres congolais comme l’a déjà fait Aya Tonga et Moudileno Massengo pourraient bien éclairer la lanterne! Sassou Nguesso n’est qu’un lion sans dent aujourd’hui.

Laisser un commentaire