Vers une Union Électorale Africaine ?

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Dans la foulée et l’urgence de la crise gabonaise, et sans doute pour tenter d’éviter les interventions étrangères à l’image de l’expérience ivoirienne, ou au contraire sous la pression des mêmes forces étrangères, l’Union africaine vient de se rappeler qu’elle a, en son sein, un Conseil de Paix et de Sécurité, inerte dans des précédentes crises, chargé d’éteindre les feux électoraux…

Ce n’est pas un scoop d’affirmer que l’écrasante majorité des États africains est constituée des dictatures, par essence allergiques au droit et à la démocratie. Évidemment. Dictatures qui, institutionnellement, s’expriment et se vérifient d’une part par l’organisation présidentialiste au plan national et continental car, ce que beaucoup ne se doutent peut-être pas, c’est que par le rôle et les pouvoirs attribués à la Conférence des Chefs d’États et de gouvernement au sein de l’U.A., cette organisation est plus présidentialiste que ne sont les États Africains au plan interne et isolément; d’autre part, et contradictoirement, tout en parlant et usant de la rhétorique de l’Union Africaine comme la solution à de nombreux maux de l’Afrique, les dirigeants africains invoquent quasi systématiquement la souveraineté comme argument pour s’opposer à l’intervention de l’Organisation dans la solution des conflits électoraux nationaux! Curieuse conception de la Communauté africaine! On a, ainsi, très récemment, vérifié à quel point le Burundi en feu s’est vigoureusement opposé aux multiples initiatives de l’U.A. pour faire cesser les violences depuis plus d’une année. Ce n’est pas le premier État.

Il va de soi, et nous n’avons manqué de le rappeler par le passé (cf notamment notre interview « De l’escroquerie politique », Congo-liberty, 23 novembre 2011) , que l’une des solutions, et pas des moindres, faute d’un modèle présidentiel revisité (Félix Bankounda Mpélé, Repenser le président africain, Revue Politique et parlementaire, 2011, numéro 1058) pour limiter sinon mettre un terme à ces crises régulières à l’occasion des élections présidentielles essentiellement, consisterait à donner, si ce n’est la totalité, du moins le maximum de compétences à un organe continental, composé à la fois des personnalités de la société civile africaine, des représentants de l’Union africaine et évidemment de personnalités compétentes de l’État concerné par l’élection. Ceci, aussi bien en amont qu’en aval des différentes étapes de l’élection, et non seulement pour la simple observation.

Indiscutablement, par cette proposition et avancée du Conseil de Paix et de Sécurité de l’U.A. à l’occasion du conflit gabonais, selon laquelle  » Le Conseil demande à la Commission, en étroite coopération avec les partenaires concernés, et dans le respect de souveraineté du Gabon, D’APPORTER SON APPUI AUX INSTITUTIONS GABONAISES COMPÉTENTES dans leurs efforts visant à renforcer la transparence et la crédibilité du processus d’examen, AINSI QUE DE LA PROCLAMATION DES RÉSULTATS DÉFINITIFS DE L’ÉLECTION PRÉSIDENTIELLE DU 27 AOÛT 2016, PAR LA COUR CONSTITUTIONNELLE », l’Union Africaine fait un pas non négligeable vers cette solution, vers une Union électorale africaine! Reste à savoir quelle sera la réponse du Gabon qui avait déjà refusé une démarche semblable de l’Union européenne.

On notera par ailleurs, et au contraire de la situation récente du Congo, que la fameuse Communauté internationale semble plus mobilisée pour le respect de la transparence électorale au Gabon, en demandant instamment le recomptage des voix. Même la Sécrétaire générale de l’OIT, dont l’envoyé spécial pour l’élection congolaise, Michel Kafando, était reparti sur la pointe des pieds sans avoir jamais  émis aucune déclaration sur le braquage électoral congolais, reprend du poil de la bête et recommande, elle aussi, le recomptage des votes dans les circonscriptions contestées, précisément dans le Haut Ogooé ! De quoi rendre suspecte cette convergence dans un pays réputé comme relevant traditionnellement du noyau dur du pré-carré français ! Car, depuis, une conviction s’est ancrée auprès des Africains que les pouvoirs successifs français se mobilisent moins pour l’enracinement de la démocratie en Afrique que pour la protection des intérêts françafricains. Vrai ou faux en l’occurrence, les grossiers résultats proclamés par la CENAP gabonaise, essentiellement concernant le fief des Bongo, finissent, paradoxalement, par perturber l’objectivité et le regard de nombreux africains en raison de cette inhabituelle mobilisation de la communauté internationale. Le cursus d’homme du sérail du challenger aidant, c’est moins la sauvegarde de la démocratie que certains africains jugent que la crainte d’un renflouement françafricain avec Jean Ping ! Comme quoi, les autorités françaises, par manque d’une politique lisible et constante de la démocratie en  Afrique, n’auront réussi qu’à semer la confusion sur leur positionnement et expression à propos des crises politiques en Afrique !

Mais, ne soyons pas dupes: cette proposition du Conseil de Paix et de Sécurité de l’U.A. n’est que conjoncturelle, et démontre à quel point l’actuel maître du Gabon est en danger et risque sérieusement de perdre son siège; ensuite, Ali Bongo n’est pas un éléphant de l’Union Africaine et, plus spécialement, il s’est mis à dos justement, certains gros poissons de cette organisation. Ce qui veut dire que l’initiative combien louable d’aujourd’hui ne fera certainement pas jurisprudence, ne sera pas de recours préventif et normal quand il s’agira des pays dirigés par des éléphants que tout le monde connaît… . Surtout que, et par comparaison, même dans des espaces déjà bien avancés dans l’intégration comme l’Union européenne, la question électorale relève encore des attributs de la souveraineté. Mais, comparaison n’est pas toujours raison.

Ainsi donc, et on insistera là-dessus, avec des juridictions constitutionnelles bien souvent inféodées au pouvoir et qui, partant, s’avèrent délibérément être contre la démocratie en Afrique, la voie d’une Union électorale africaine, comme solution préventive aux crises électorales chroniques et violentes en Afrique, mais surtout comme signe d’une volonté réelle de l’instauration de la démocratie et de l’accélération de l’intégration africaine, devient plus qu’impérative, au regard de nombreuses insuffisances qu’aura re-démontré 2016, et en attendant le bourbier de la RDC. A condition, bien entendu, comme on l’a dit plus haut, que sa composition éclectique (société civile africaine, représentants de l’Union africaine, et membres compétents de l’État concerné ) et son indépendance donc par rapport aux pouvoirs classiques (Chefs d’État) soit garantie. Mais, là également, on connaît déjà la réplique dictatoriale, sous le couvert opportuniste de la souveraineté aiguisée, pourtant contradictoire avec l’intégration africaine…

Félix BANKOUNDA MPÉLÉ

10 thoughts on “Vers une Union Électorale Africaine ?

  1. Takou Ngué-sot a gagné quelle élection au Congo?
    Le conseiller spécial Moncoco est le produit de qui?
    Marc Madoungou Mitoumbi a déjà gagné quel débat sur les TVs françaises? Ou villageoises!

  2. CHERS AMIS, LA JUSTICE, LA DÉMOCRATIE ET LE RESPECT DES LOIS NOUS ENSEIGNENT DE RESPECTER LE CHOIX DU PEUPLE GABONAIS. MÊME SI L’ART.10 DE LA CONSTITUTION GABONAISE A ÉTÉ VIOLÉE. AU MOINS NOUS AVONS L’OBLIGATION DE RESPECTER LE CHOIX DU PEUPLE GABONAIS… CEUX QUI ONT DE LA DIFFICULTÉ À LE COMPRENDRE SONT LES ÉNNÉMIS DE L’AFRIQUE…
    EKANGMAN / LIBREVILLE
    C’est pour la première fois dans l’histoire des élections organisées et contrôlées par un pouvoir en place, que j’entends des arguments selon lesquels un candidat de l’opposition aurait gagné dans certaines localités en procédant à des fraudes massives et qui de plus sont gérées par les les représentants de ce même pouvoir. Pourtant, les délégués de la CENAP, de l’opposition, de l’UA, de l »UE, du pouvoir, etc… ont tous, de commun accord, signé ou validé les PV et ensuite les gouverneurs de province nommés par le pouvoir et étant membres du parti au pouvoir, viendraient tout bonnement officialiser par leur lecture, ces mêmes résultats frauduleux. C’est grave !… Soyons un tant soit peu sérieux ici. Nous sommes tous gabonais et nous connaissons tous notre pays quelque soit notre bord politique. L’on ne peut pas se permettre d’accepter, parce qu’on se trouve du côté du pouvoir. Pourquoi fermer les yeux sur le fait que la province-sœur du Haut-Ogooué n’a pas 250.000 habitants, que même s’il y existe 71000 électeurs, ce dont je doute fort, tout le monde s’est levé ce jour-là pour aller élire le « fils » du coin. Aller chercher des excuses fallacieuses pour justifier cela en accusant l’opposition d’avoir fraudé, cela à l’heure des smartphones avec caméra qui ont tout filmé (à l’instar d’un bureau de Bongoville où Jean Ping bat Ali Bongo à plate couture et où l’on intervertit grossièrement les noms), c’est faire dans la pure diversion et insulter l’intelligence des gabonais. Nous avons bien, très bien même appris les leçons du passé (1993, 1998, 2005 et 2009). Le chien qui aboyait est devenu une panthère. Et qu’on le veuille ou pas, rien ne sera plus comme avant dans ce Gabon!

  3. Ira-t-il, n’ira-t-il pas à New York ? Le dictateur reçoit des signaux contradictoires de ses Services. Même Abdoulaye Bathily, le représentant spécial de Ban Ki-moon, qui lui a rendu visite, mercredi, 14 septembre, à Brazzaville, n’en sait trop rien.
    Le dictateur voudrait bien aller s’afficher, à New York, qui est l’occasion rêvée pour lui de bomber le torse. Car à l’international, sa côte d’amour est au point mort : personne n’oublie que lors de l’élection présidentielle du 20 mars, il avait coupé le téléphone, internet et les réseaux sociaux pendant 4 jours, afin de passer en force.

    D’autre part, son score de 8% obtenu à l’issue de ce scrutin avait, finalement, été transformé à 60%, soit, une victoire dès le premier tour. C’est, donc, un forceur qui souhaiterait quitter Brazzaville pour aller arpenter les couloirs des Nations-Unies, dans l’espoir d’avoir quelques contacts réconfortants.

    Cela dit, le dictateur pourrait être contraint de rester sur place, au Congo. En effet, ses services de sécurité lui interdisent, formellement, de bouger du pays, par crainte d’un coup d’état militaire. Après l’avoir raté le 15 août dernier, dans la Bouenza, « les libérateurs » seraient prêts à renouveler leur tentative pendant son absence de Brazzaville. Voilà, donc, le général 5 étoiles mis dans un embarras insoutenable. Que va-t-il décider ? Mystère !

    Sassou-Nguesso souhaiterait, pourtant, faire le déplacement de New York dans le but, aussi, et surtout, de tester les dégâts que provoque le rapport de Me Maurice Massengo Tiassé, son deuxième vice-président de la Commission nationale des droits de l’homme. Ce rapport met en exergue ses massacres et les emprisonnements d’hommes politiques perpétrés par le dictateur, depuis octobre 2015, date du changement de sa nouvelle constitution. On compte, depuis cette date, plus de 80 prisonniers politiques dont le vainqueur de l’élection présidentielle du 20 mars, Jean Marie Michel Mokoko, mais aussi, des opposants de premier plan comme Paulin Makaya et Modeste Boukadia, qui n’ont même pas eu l’opportunité de se présenter à la présidentielle, Sassou les ayant emprisonnés.

    Ce rapport d’une rare violence met à nu le système de Sassou et montre comment il assassine ses compatriotes et pille le pays avec sa famille, sans que personne n’ait le droit de contester quoi que ce soit. Ce rapport publié dans le numéro 444 d’Afrique Education a mis le dictateur dans tous ses états. Très fâché contre ses services de sécurité, il a dit, devant des proches, ne pas comprendre, jusqu’à maintenant, pourquoi personne n’est capable de lui dire où se cachent le pasteur Ntoumi (malgré les 1.000 militaires et mercenaires lancés à ses trousses dans le Pool), mais aussi, André Okombi Salissa et Marion Madzimba. Sassou-Nguesso ne décolère pas que Me Massengo-Tiassé (avec son brûlot dans les mains) ait quitté Brazzaville sans se faire coincé. Et surtout, comment a-t-il pu réunir autant d’informations à la barbe des services de renseignement ?

    Envoyé aux Etats-Unis en éclaireur pour préparer le terrain (politique et diplomatique à son père), Denis Christel Sassou-Nguesso a échoué dans sa mission à cause de ce rapport à charge.

    Très mécontent, le dictateur a poussé la comparaison avec l’époque où le général, Emmanuel Ngouelondélé, tenait les Services, avec « exactitude et déontologie » et avec moins de moyens.

    Le dictateur est vraiment en colère alors que les grèves se multiplient dans les secteurs de santé, à l’université et dans les entreprises, faute de salaires : la crise est là. Elle a poussé le premier ministre, Clément Mouamba, dont le récent séjour, à Paris, est passé inaperçu, à inviter l’opposition à la tenue d’un dialogue. Seulement, il l’a dit à voix tellement basse que personne ne l’a entendu. Peut-être devrait-il le crier haut et fort sur Télé Congo au journal de 20 heures.

    Revenons au rapport de Massengo-Tiassé, qui a réussi à faire perdre le sommeil au dictateur et qui sera disponible sur la boutique d’Afrique Education (www.afriqueeducation.com) dès la semaine prochaine. Sassou-Nguesso enverra, début octobre, une délégation au Conseil des droits de l’homme des Nations-Unies, à Genève, afin de contredire les « allégations » de Me Maurice Massengo-Tiassé. Cette délégation devrait être conduite par le ministre de la Justice garde des sceaux et comprendrait des têtes brûlées comme le procureur Oko Ngakala.

  4. Allons-nous compliquer le problème? Qui ne le sait pas que l’UNION AFRICAIN est sodomisée par la France.
    Quand sassou tue les congolais par millier ou quand sassou élève le droit de vote des congolais quelle décision en faveur du peuple congolais est sortit de cette union.
    LE PROBLÈME DU CONGO EST CONNU
    LA COLONISATION FRANÇAISE QUI A TOURNÉE A L’ESCLAVAGISME
    LA SOLUTION C’EST CHASSÉE LA France DE NOTRE PAYS
    LA France EST L’ORIGINE DE TOUT LA MAL DU CONGO CAR LA BANDE DES TERRORISTES SASSOU OKOI NDENGUE ET AUTRES C’EST L’ŒUVRE DE LA France.
    NOUS AVONS ABSOLUMENT RIEN ET RIEN A PERDRE EN CHASSANT LA France DE CHEZ NOUS.
    L’UNION AFRICAIN DOIT PRENDRE DES RÉSOLUTION COMMENT METTRE LA France HORS D’AFRIQUE.

  5. Pas du tout étonnant, et comme il fallait s’y attendre, la juridiction constitutionnelle gabonaise a rejeté, selon une information du 20 septembre, la proposition du Conseil de Paix et de Sécurité de l’Union africaine de fournir des experts pour plus de transparence dans le décompte et la proclamation des résultats. Par ailleurs, elle a clairement annoncé qu’elle ne procéderait pas au décompte mais uniquement à vérifier la régularité des PV des différentes circonscriptions de vote contestés.

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