18 décembre 1998 – 18 décembre 2020 : 22 ans déjà

18 décembre 1998 – 18 décembre 2020, 22 ans déjà depuis le déclenchement de la guerre de Bacongo qui a ravagé le Pool en particulier. Je viens partager avec vous mes souvenirs de cette terrible situation ayant pris beaucoup d’entre nous au dépourvu. Il s’agit ici, non pas de mon point de vue sur cette guerre, mais de mon témoignage concernant ce que j’ai vu et entendu, donc vécu au début de cette tragédie humaine.

Alors que le soleil était sur le point d’achever de parcourir son premier cadrant de la journée, je pris le bus de Bacongo en direction de Moungali. Ce fut le 18 décembre 1998. Là, je rendis visite à mon frère malade. Autour de 11h, je repris le chemin de retour. Puisque, curé de la paroisse Notre Dame à l’époque, je devrais célébrer les funérailles d’un enfant à midi. A hauteur du Palais du parlement au Plateau de 15 ans, notre bus s’arrêta et le chauffeur somma les passagers de descendre. Car, un vent de panique se vit à travers les véhicules croisés klaxonnant, dont les gens à bord multiplièrent des signes pour prier ceux qui allaient dans notre sens de faire volt-face. Ils nous signalaient que c’était dangereux de se rendre à Bacongo. En même temps, de là, on pouvait entendre des bruits d’explosion venant de cette zone.

Quatre femmes et moi, décidions de faire chemin ensemble dans l’espoir de rentrer à Bacongo. Au niveau du rond-point Patte-d’oies, un contingent militaire voulut nous empêcher de continuer, mais devant l’insistance des mamans en pleurs, inquiètes du sort de leurs enfants restés à la maison, il nous laissa passer. Nous empruntâmes alors le chemin menant vers OROSTOM en passant par le bord du stade Massamba-Débat et le campus. Et arrivés à Château d’Eau, je pris congé des dames et je trouvai refuge à la paroisse de Gangouoni, le temps d’attendre le silence des armes, puis reprendre le chemin pour ma paroisse.

 Vers 16h, alors que ce bruit s’éloignait, nous entendîmes des clameurs du côté de l’axe Château d’eau – kinsoundi. Le confrère P. et moi sommes sortis voir. Nous y vîmes deux colonnes de Nsiloulous avec des armes de chasse pour certains et des bouts de bois pour d’autres. Ce bataillon se dirigeait vers la Télévision, tout en conseillant aux populations de quitter la zone pour l’autre rive du Djoué.

Le confrère P. fut tenté de suivre le conseil, mais il se heurta à mon obstination de n’aller  nulle autre part que dans ma paroisse, et renonça. Devant la situation, Feu l’abbé Marcel et l’abbé P. me retinrent afin de  passer la nuit chez eux.

Mais, la nuit fut longue, non moins à cause de l’insomnie que des bruits des armes. Toute la nuit, on entendît les combats s’approcher jusqu’à avoir l’impression qu’ils se déroulaient autour de la paroisse.

Au petit matin du 19 décembre, nous sentîmes que le bruit des armes se déplaçait vers l’autre côté du Djoué. Et au même moment, des individus tambourinant sur le portail fermé criaient en lingala que quelqu’un vienne ouvrir. Devant notre silence, supposant peut-être qu’il n’y avait personne dans cet enclos, ces individus  continuèrent leur route.

Peu après, nous ouvrîmes le portail à un jeune qui avait besoin de soins. Heureusement, un infirmier rejoignit vite la paroisse. Seulement, devant une plaie béante avec rupture du fémur, et le manque de produits appropriés, ce dernier ne put rien faire. De plus, la réflexion de ce qu’il convient de faire fut coupée par les rafales entendues à proximité de la paroisse. On se dispersa spontanément, abandonnant du coup le blessé. Et dans la foulée, les cobras nous débusquèrent alors qu’on s’était vautré dans les chambres.

Sortis de forces après de sérieuses menaces, nous étions regroupés et mis à genoux, sauf le feu abbé Marcel à cause de sa prothèse. Nous fûmes quatre prêtres, un couple et leurs trois enfants. Sur les cinq hommes en armes, quatre menaçaient de nous exécuter. Nous les entendions dire en lingala ce que je transcris en français : « Nous avons reçu l’ordre de tuer et c’est ce que nous avons fait jusqu’ici. Alors pourquoi épargner ceux-là ? ». L’autre, qui visiblement fut le chef, défendait notre cause. Il leur disait : « ce sont des prêtres. Je vous autorise à les piller et non à les tuer. » Et, il se tournait vers nous pour nous demander de les laisser prendre tout, y compris de l’argent. Nous nous exécutâmes.

Ayant échappé à cette mort programmée, nous rejoignîmes, quelques-uns, le couloir dit humanitaire qui fut l’avenue menant de Château d’eau au carrefour de l’immeuble de UAPT en passant par la Télévision et le lycée 1er mai. L’abbé Marcel, la femme et les enfants, eux partirent avec l’un des hommes en armes au volant dans le véhicule de l’abbé, lequel véhicule bien-sûr changea de propriétaire instantanément.

Tout au long du couloir, un spectacle désolant se présentait à nous : beaucoup de cadavres.

Deux check-point étaient dressés sur ce chemin : le premier au niveau de la Télévision et le second au niveau du lycée 1er mai. A tous ces points, nous fûmes fouillés et rackettés, surtout mes deux confrères en soutane. Ainsi avions-nous atteint l’UAPT et rejoint cette masse de gens sortie de Bacongo côté Notre Dame. J’eus la joie de retrouver un bon nombre de mes paroissiens qui s’imaginaient ne plus me revoir vivant. Ceux-ci me racontèrent que presque tout le quartier a passé la nuit à la paroisse. Et plus sinistre, leur récit fit état de jeunes ayant été retirés du cortège et conduis vers une destination inconnue. D’ailleurs, un peu avant UAPT, un jeune fut brûlé vif à l’aide d’un matelas en mousse alors qu’on venait de le cribler de balles et ce, devant sa mère et le regard impuissant de ceux qui le connaissaient.

M’étant rassuré que beaucoup de mes connaissances et proches étaient encore en vie, y compris les membres de ma famille dont certains s’étaient réfugiés chez moi quelques jours plus tôt ainsi que l’abbé R. mon vicaire, j’eus proposé d’aider à porter au dos la grand-mère d’un séminariste. Et chemin faisant, les hommes en armes sur la route ont tenté de m’accuser à deux reprises d’être milicien ninja. Heureusement, la sœur Florence, sœur de Cluny se dévoua à me défendre, et c’est elle qui annonçait à mes accusateurs qui j’étais.

La masse affaiblie et résignée, dont je fis partie put échouer ainsi dans la zone nord de Brazzaville.

Voilà comment je m’étais retrouvé à la paroisse Saint Jean-Marie Vianey où avaient déjà pris place, des confrères et des populations sinistrées.

Pour conclure mon récit, je me permets de rappeler ce qui, peut-être, n’a pas retenu l’attention : les hommes en armes dirent : « nous avons reçu l’ordre de tuer et c’est ce que nous avions opéré jusqu’ici… ». Ayant vu, plus tard, passer sous mes yeux un document confidentiel prévoyant un plan de réduction de la population du pool, ces propos, jadis négligeable, ont pris depuis une autre résonnance : Un plan bien réfléchi était en cours d’exécution à ce moment-là.

Abbé Emmanuel

8 thoughts on “18 décembre 1998 – 18 décembre 2020 : 22 ans déjà

  1. Le génocide des bacongo-laris crève les yeux et n’est pas imaginaire ,précédé par les assassinats des andzimbas sous ngouabi.Les opérations mouebara et colombe sont toujours d’actualité en secret.La diaspora doit continuer à alerter et prendre la communité internationale à témoin afin de condamner le génocidaire sassou.

  2. DES GÉNÉRATIONS ENTIÈRES SACRIFIÉES…
    Nous qui avons une position clairement prononcée en défaveur du chef du chaos, du tribalisme, des génocides notoires, le général empereur mbochi, président à vie Sassou Denis.
    Nous qui n’avons pas de carte de membre des partis dinosaures serviles ( PCT, UPADS, MCCDI, RDPS, RDD )… et apparentés UDH-YUKI, UMP, MUST…
    Nous qui ne jouons pas le jeu des modérés.
    Nous avons des raisons de vivre et d’agir ensemble.
    Agir ensemble pour le SURSAUT RÉPUBLICAIN et dire NON :
    NON à la médiocratie ;
    NON à ce dictateur érigé en génocidaire ;
    NON à ces opposants du ventre ;
    NON à ces partis dinosaures ;
    NON au pouvoir clanique ;
    NON aux souffrances interminables ;
    Mobilisons-nous pour une nouvelle alternance.
    APPORTONS LE CHANGEMENT ET OSONS.
    Indignons-nous davantage pour le futur de la Nation et de nos enfants.
    LE PEUPLE GAGNE TOUJOURS
    #La_Résistance_Certifiée
    Parfait Bihani

    ALAIN KIMPO DES INDIGNÉS 242: ALLO EMPEREUR SASSOU D’OYO OU EST L’ARGENT DES RETRAITÉS CONGOLAIS? https://www.youtube.com/watch?v=YGKjjtcSK40

  3. Bonsoir
    je suis maitre Antoine djaffa ,maitre spirituel des esprits et très connue pour mes travaux occulte je suis disponible pour résoudre tous vos problèmes tel-quel soit
    1:Retour affectif
    2:Parfum de chance
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    5:Savon de chance
    6:Gagner aux jeux de Loto
    7:Rituel de richesse
    8:Bague de richesse
    9:Porte monnaie de richesse
    10:valise de richesse
    11:Comment Guérire du faiblesse sexuelle
    Etc…….
    Tel:22967689066

    http://www.pacteavecsatana.wordpress.com

  4. Les Mbochi seront jugés ainsi que leurs alliés. Aucun crime ne restera impuni…Justice sera faite pour tous ces massacres réalisés par les mbochi et leur empereur sassou. A tous les MBOCHI, sachez que sassou vous a collé une étiquette qui restera de génération en génération. Qui vivra verra, la roue tourne.

  5. TEMOIGNAGE UNIQUE TEMOIGNE NUL

    IL N YA PAS MEILLEUR SOUVENIR A SE REMEMORER QUE CELUI DE LA NON ORGANISATION DES ELECTIONS PRESIDENTEILLES PREVUES LEGALEMENT SE TENIR EN JUILLET 1997.QUEL BEAU SOUVENIR QUE CETTE ELECTION INTENTIONNELLEMENT ESQUIVEE.PAR QUI? POURQUOI?

    TEMOIGNAGE UNIQUE TEMOIGNAGE NUL

    ABBE EMMANUEL MON OEIL

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