L’élection présidentielle du 20 mars 2016, le rendez-vous manqué de l’opposition

20 mars 2016 – 20 mars 2018, deux ans jour pour jour que se tenait dans notre pays le Congo Brazzaville, une élection présidentielle à laquelle avaient pris part cinq(5) candidats de l’opposition à savoir : Pascal TSATY MABIALA, Guy Brice Parfait KOLELAS, Jean Marie Michel MOKOKO, Claudine MUNARI et André OKOMBI SALISSA. Cette élection tant attendue venait après un référendum très contesté qui a abouti au changement de la constitution du 20 janvier 2002 permettant ainsi au président Denis SASSOU NGUESSO qui était sur le point de finir son deuxième et donc dernier mandat de faire sauter le verrou de la limitation à deux(2) du nombre des mandats ainsi que de la limitation à 70 ans de l’âge maximum pour se présenter à une élection présidentielle. Ce référendum organisé dans un climat de forte tension ponctuée par des nombreux morts, le 25 octobre 2015 aboutira à la promulgation d’une nouvelle constitution le vendredi 06 novembre 2015 qui permit au Président Denis SASSOU NGUESSO de se présenter à cette élection présidentielle.

Il faut tout de suite signaler que depuis le retour en pouvoir du président Denis SASSOU NGUESSO en octobre 1997, jamais une élection n’avait suscité tant d’espoir d’alternance car, contrairement aux élections présidentielles de 2002 et 2009, cette fois ci les candidats opposés au président sortant étaient de taille et avaient une vraie assise nationale. Mais le président SASSOU NGUESSO en changeant la constitution pouvait il organiser les élections et les perdre ? Si oui avons-nous tout fait pour qu’il en soit ainsi ?

En politique comme dans la vie courante lorsqu’en veut obtenir quelque chose, en se donne les moyens pour l’avoir. Les candidats de l’opposition à cette élection avaient-ils pris toutes les dispositions nécessaires pour assurer une alternance au pouvoir et assumer les plus hautes fonctions suprêmes de notre pays ?

Avec le recul, il parait de toute évidence que l’opposition en allant à cette élection ne semblait pas être prête à obtenir le départ du président sortant et ceci s’explique par plusieurs faits.
Alors que l’élection présidentielle devrait se tenir au mois de mars 2016, jusqu’au mois de décembre 2015, les leaders de l’IDC à savoir André OKOMBI SALISSA et Guy Brice Parfait KOLELAS ne s’étaient pas encore entendus pour savoir qui des deux devrait être le candidat unique de leur plate-forme et ont donc fini par se présenter tous les deux à cette élection alors que le bon sens recommandait qu’un des deux se désista au profit de l’autre.
Du coté du FROCAD aussi c’était le même scénario, entre Pascal Tsaty MABIALA et Claudine MUNARI pas d’entente possible entre ces deux anciens compagnons du président Pascal LISSOUBA. Les deux candidats certes mal cotés ont tous les deux maintenu leurs candidatures alors que l’efficacité exigeait que l’un deux se retira au profit de l’autre. Et dans tout ce méli-mélo est arrivé le général Jean Marie Michel MOKOKO qui bouscula les codes et boucla la boucle. Le souhait initial de Claudine MUNARI d’avoir un candidat unique à l’opposition ne trouvera donc pas de preneur et d’échos favorables car les égos, la politique de positionnement et autres ambitions avaient pris le dessus sur la cohésion et l’efficacité.
C’est donc à cinq (5) que les candidats de l’opposition se sont jetés dans la bataille sans une réelle stratégie commune sur la contestation des résultats, la sécurisation des résultats sortis des urnes ,la présence effective de nos représentants dans les différents bureaux de votes et l’attitude à adopter après le vote en cas des difficultés .La stratégie de l’étreinte du BOA prônée et mise en exergue par ces candidats avait montré ses limites car très vite, des failles sont apparues dans le dispositif.

Alors qu’il fallait occuper toute l’étendue du territoire national pendant la campagne présidentielle, les candidats de l’opposition ont passé les trois quart (3/4 ) de leur temps de campagne dans la partie sud du pays délaissant de ce fait la zone nord du pays alors que c’est dans cette zone qu’il fallait mettre le paquet pour contrecarrer le candidat Denis SASSOU NGUESSO. Tout le monde savait que l’élection devrait se jouer dans la zone nord mais curieusement aucun travail de fond n’avait été fait dans cette zone considérée comme fief électoral du président Denis SASSOU NGUESSO.

Du coté de la majorité présidentielle, le décor était planté et les choses prises au sérieux car il fallait assurer la victoire du président de la république dès le premier tour. Les choses étaient vues en grand sur tous les plans possibles car un deuxième tour signifierait la défaite du président sortant qui n’aurait plus de réserve des voix et jouait donc le va-tout. Toutes les forces furent donc mobilisées pour faire élire leur champion dès le premier tour.

Quand on va au combat politique avec un homme politique de la carrure du président Denis SASSOU NGUESSO on ne fait pas les choses en détail, dans l’improvisation car l’homme est au pouvoir depuis plus de 30 ans et est au sommet de la politique dans notre pays depuis plus de 40 ans. On n’est pas président de la république pendant des années sans être un homme des réseaux mais aussi de poigne. Quoi qu’en dise, le président Denis SASSOU NGUESSO est celui qui connait le mieux l’homme politique congolais. Or l’impression qui s’est dégagée durant la période d’avant et pendant la campagne y relative est que nous l’avons sous-estimé et l’avons cru incapable de rebondir alors que le volte-face de François HOLLANDE sur le changement de la constitution était un indice suffisant pour comprendre que le président sortant avait le soutien de la France et qu’il ne fallait pas vendre la peau de l’ours avant de l’avoir au préalable tué.

Ce n’est donc pas en improvisant ici et bricolant là comme nous l’avons fait que l’on pouvait venir à bout d’un candidat qui s’était préparé pendant des années à cette élection présidentielle. Il aura fallu que nous fassions plus tant sur le plan électoral que sur le plan diplomatique.
Nos candidats ont failli sur plusieurs points. La méthode, la cohésion, l’unité d’action ont fait défaut à tel point que lorsque les premières difficultés sont apparues, tout s’est disloqué et est tombé comme un château de cartes. La guerre des égos et la politique de l’empêchement n’ont pas favorisé l’intérêt général. La charte de la victoire signée par les cinq (5) ne prévoyait rien sur la gestion des crises et s’était bornée sur le soutien qui devrait être apporté au candidat qui arriverait au deuxième tour face du président sortant.

Quant à la commission technique électorale (CTE) mise en place par les cinq (5) candidats et dirigée par le professeur Charles ZACHARIE BOWAO, elle a été incapable de nous fournir jusqu’aujourd’hui les résultats définitifs de ladite élection et s’est contentée de nous donner des résultats incomplets et non fiables aux yeux de la communauté internationale. Comment dans ces conditions affirmer avec certitude que le président Denis SASSOU NGUESSO aurait seulement obtenu 8 % si nous sommes incapables de produire tous les résultats de cette élection ?

Après la proclamation des résultats partiels, le 24 mars 2016 par la Commission Nationale Électorale Indépendante (CNEI) dirigée par Henri BOUKA, une chape de plomb s’est abattue sur l’opposition à tel point qu’aucune décision commune de grande portée et concertée ne fut prise pour créer un rapport de force politique. Chaque candidat a fait ce qui lui semblait bon alors qu’il y avait une CTE qui était censée réguler les choses.

En gros, le fonctionnement de l’opposition portait déjà les germes de la défaite assurée et il en sera ainsi en 2021 si on y prend garde et si on ne change pas notre façon de faire car les mêmes causes vont reproduire les mêmes effets. Aujourd’hui deux ans après cette élection tout semble malheureusement être au point mort du coté de l’opposition et on laisse faire les choses en espérant peut être que Dieu le tout puissant agira pour nous.

Pour le Congo de demain, c’est maintenant qu’il faut commencer à travailler et non attendre le dernier jour et tout improviser. Chacun doit prendre ses responsabilités pour le Congo qu’il veut voir demain.

Henri Blaise NZONZA

 

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