Il y a 40 ans, la mort d’un président au marxisme «bien tempéré» à Brazzaville

Le « chef de la révolution congolaise » avait été si populaire en son temps que ses jeunes partisans avaient proposé, après son assassinat, de débaptiser Brazzaville pour la nommer Ngouabiville. Toujours inexpliquée après 40 ans, la mort du commandant Marien Ngouabi, le 18 mars 1977, à Brazzaville, reste empreinte de mystère. Les télégrammes diplomatiques français que RFI a pu consulter décrivent les lendemains de l’assassinat, alors que le pouvoir se réorganise, qu’une chasse aux sorcières est lancée et que la rivalité s’installe entre deux officiers : Joachim Yhombi-Opango et le jeune Denis Sassou-Nguesso. Jusqu’à la victoire de ce dernier.

19 mars 1977. L’annonce est faite sur la radio officielle congolaise. Un commando-suicide à la solde de « l’impérialisme aux abois » a tiré à bout portant sur le « camarade Ngouabi ». Moins de 12 heures après sa mort, un comité militaire du Parti congolais du travail, la formation marxiste-léniniste que Ngouabi a fondée en 1969, s’est octroyé les pleins pouvoirs. Composé de 11 personnes, ce comité porte à la tête de l’État le ministre de la Défense, le commandant Denis Sassou-Nguesso.

Le jeune officier devient chef de l’Etat – du moins pendant quelques jours. Ce qui, en pleine Guerre froide, inquiète le Quai d’Orsay. La garde personnelle de Denis Sassou-Nguesso est composée de militaires cubains. Il passe pour prosoviétique. Il est réputé être « radical ».

« Ce que nous savons de la personnalité du commandant Sassou-Nguesso laisse prévoir une nouvelle radicalisation d’un pouvoir qui se préparait à revenir à la modération, soutient une note du Quai d’Orsay du 25 mars 1977. La ligne générale politique du pays ne devrait cependant pas subir de modification fondamentale. On peut simplement craindre un accroissement de la présence soviétique et cubaine. »

Même si l’économie congolaise connaît des difficultés (dues à la chute de la production pétrolière et à la fin de l’exploitation des mines de potasse, notamment), beaucoup de Congolais pleurent un chef d’État qui jouit d’une véritable popularité. D’origine modeste, ce militaire préférait les treillis aux tenues d’apparat, les casquettes en toile aux képis. Il lui arrivait même de travailler aux champs.

Dans les cercles du pouvoir, toutefois, Ngouabi ne faisait pas l’unanimité. Il a dû déjouer une dizaine de tentatives de coup d’État et a même échappé à un accident d’hélicoptère.

Il n’était pas, non plus, en odeur de sainteté à Paris. Cet ancien chef de bataillon, bien que formé en France, ne cessait de dénoncer le « néocolonialisme ».

Au lendemain de son assassinat, les nouvelles autorités mettent en cause un commando qui aurait eu des complices au sein de la garde présidentielle. Soupçonné d’être de mèche avec les assassins, l’ancien président Alphonse Massamba-Débat est vite arrêté. Le défenseur du « socialisme bantou » — à la différence du « socialisme scientifique » prôné par Ngouabi — reconnaît avoir trempé dans une cabale, toujours selon la thèse officielle. Ses « aveux », qui donnent la curieuse impression d’être lus, sont même diffusés à la radio.

« Il s’agit en fait d’un montage de déclarations […] qui ne peut convaincre aucun observateur de bonne foi et laisse une impression pénible », rapporte l’ambassadeur de France, Bertrand Dufourcq, le 24 mars 1977.

Massamba-Débat sera sommairement jugé par une cour martiale et fusillé. Son ancien Premier ministre, Pascal Lissouba, lui aussi arrêté, sera condamné à mort, une peine qui sera commuée en détention à perpétuité. Il sera libéré deux ans plus tard.

Quelques jours après la mort de Ngouabi, le cardinal Émile Biayenda est lui aussi assassiné. Des fidèles en colère assistent aux funérailles du jeune et populaire prélat. « Ce jour-là, j’ai vu, ce qui ne m’était jamais arrivé jusqu’alors, la détresse et la colère de tout un peuple », peut-on lire dans un message conservé aux archives du Quai d’Orsay et non signé, en date du 28 avril 1977. Le vicaire général, qui préside la cérémonie religieuse, calmera ses ouailles.

Après le bref intérim de Sassou, un colonel Yhombi Opango, succède à Ngouabi, mais le commandant Sassou-Nguesso veille au grain. Ce dernier redouterait « la réapparition de l’influence occidentale » à Brazzaville, selon une note pour le ministre des Affaires étrangères (Jean-François Poncet) datée du 26 décembre 1978 : « Le clan radical du comité militaire du Parti, animé par le colonel Sassou-Nguesso, et les organisations de masse (jeunesse et syndicats) inféodés aux Soviétiques, exercent une surveillance de tous les instants sur le chef de l’État. »

Ce commandant n’inspire guère confiance au Quai d’Orsay. Cet officier est « fortement soutenu par les Soviétiques et les Cubains », selon une note du 31 mars 1977. L’auteur du texte voit se dessiner une « âpre » lutte pour le pouvoir entre radicaux et modérés « car ce que nous savons de la personnalité du commandant Sassou-Nguesso laisse prévoir une nouvelle radicalisation d’un pouvoir qui se préparait à revenir à la modération ».

Le ministère des Affaires étrangères craint une nouvelle flambée de « passions » dans cette ancienne colonie du « Moyen-Congo ». Elles seraient monnaie courante depuis la chute de l’abbé Fulbert Youlou, en 1963 : « Règlements de comptes au sein du parti unique, purges dans les rangs de l’armée, remaniements ministériels en chaîne, ‘valse’ des premiers ministres […] tandis qu’à plusieurs reprises les détenteurs du pouvoir devaient faire face à des tentatives de putsch, voire à des mouvements de rébellion armée », explique une longue note datée du 30 mars 1977.

Au Quai d’Orsay, on attribue cette instabilité à « un phénomène de décomposition interne » : « Le président Ngouabi, dont tout le monde s’accorde à reconnaître le courage physique, avait, avant de tomber sous les balles de l’un de ses compagnons d’armes, déjà dû affronter plusieurs conspirations tramées pour la plupart, non pas par des civils, mais par ses pairs. »

Les diplomates français estiment d’ailleurs que la classe politique à Brazzaville était, depuis longtemps, plus révolutionnaire en paroles qu’en actes. Pierre Hunt, ambassadeur à Brazzaville et futur porte-parole de l’Élysée (sous Valéry Giscard d’Estaing), l’avait constaté dès le début des années 1970.

Le marxisme du président Ngouabi était « bien tempéré», écrivait-il le 4 avril 1973 : « Déçu par le manque d’efficacité des entreprises d’État, inquiet de la démagogie syndicale, le président congolais veille par une navigation un peu sinueuse à éviter les récifs. Ses adversaires du moment, appuyés sur un radicalisme juvénile, ne veulent point d’un ménagement et appellent par tous les moyens les grands bouleversements générateurs de la société prolétarienne. »

L’avènement d’une démocratie populaire ne fait pas rêver le colonel Yhombi-Opango, qui succédera au « camarade Ngouabi » le 6 avril 1977. « Le nouveau chef d’État […] est, de loin, le plus intelligent, le plus faisandé aussi, assure le document non signé du 28 avril 1977. Il semble, en particulier, qu’il ait magistralement doublé l’homme des Russes et des Cubains, Sassou-Nguesso. Il a la réputation d’être pro-occidental mais se garde bien de le dire. »

Pro-occidental? Il l’est sûrement puisque le nouveau président se rapprochera vite de Paris, où il rencontre, dès juin 1977, le président Valéry Giscard d’Estaing. Ce dernier donnera le feu vert à l’envoi à Brazzaville de deux commissions d’experts, l’une pour relancer l’exploitation de la potasse, l’autre pour apprécier la situation économique du pays.

Denis Sassou-Nguesso – un ministre qui « ne semble pas jouir d’une grande popularité ni dans le parti, ni surtout dans l’armée », soutient un document « confidentiel défense », daté du 7 juillet 1977 – éprouve, selon la diplomatie française de l’époque, une animosité notoire pour le président Yhombi.

Un autre document « confidentiel défense » daté du 11 août 1978 prédit la suite : « Les rivalités qui opposent le président Yhombi-Opango à son ministre des Armées, Sassou-Nguesso, soutenu par les Cubains, prennent un ton aigu et pourraient déboucher sur une épreuve de force. » Le président Yhombi sera effectivement remplacé, deux ans plus tard, par Denis Sassou-Nguesso.

Ce récit révèle qui est le véritable cerveau des crimes politiques et de sang odieux qui ont eu lieu a partir du 18 Mars 1977 jusqu’à nos jours, soit 40 ans de mystères, de peurs, de terreurs, de dictature et d’appauvrissement du Peuple.

Peuple Congolais, connais les racines de ton mal et sois « libérer » par tes vaillants fils.

Michel Arseneault

7 thoughts on “Il y a 40 ans, la mort d’un président au marxisme «bien tempéré» à Brazzaville

  1. N’AYEZ PAS PEUR
    JEAN PAUL II l »avait lancé à l’endroit du peuple polonais brutalisé par le régime féroce de JARUZELSKI en pologne. WALESA avait osé et il a vaincu!
    Le peuple congolais doit le savoir que SASSOU n’est ni DIEU, ni SAINT disait NTSOUROU et vit dans la peur d’une chute brutale avait dit BLAISE ADOUA sur son lit d’hospitalisation au maroc// Adoua disait que sassou reconnait qu’il a beaucoup commis d’erreurs et craint un jour etre jugé ou assassiné brutalement voilà pourquoi il est violent , il a cessé d’écouter ses conseillers , sa femme et moins encore MAURICE NGUESSO, qui chante souvent la chanson « MWANA YOKA TOLI » de BELLA BELLA;L’homme vit souvent isolé et délire de fois! ses nuits sont longues et troublées , l’homme souffre terriblement et prend les sominifères à tout casser revélations faites par un homme clé du système sécuritaire de l’homme du 20 MARS 2016!
    LA FIN EST PROCHE

  2. Marien Ngouabi etait aussi en complot avec Sassou Nguesso. Il avait aussi participè aux assassinats de Ange Diawara et ces amis. Lorsque le corps de Diawara sans vie etait exposè au stade de la rèvolution, Marien Ngouabi etait belle et bien prèsent.

    1. l assassin de Ange Diawara et ses compagnons fut bien ngouabi. n avait il pas predit avec une date la mort de Ange Diawara et ses amis quand il avait cloture le congres de l URFC qui se tenait quelques jours avant . je me rappelle bien de son discours avec jubilation il avait dit je cite  » DANS UNE SEMAINE ANGE DIAWARA SERA MORT' » . C EST APRES QUE NOUS AVIONS VITE COMPRIS QUE ARRETES AU ZAIRE DIAWARA ET SES AMIS ETAIENT EN PRISON QIUELQUE PART DANS BRAZZAVILLE. C EST LUI NGOUABI QUI AVAIT DECIDE QU ILS DEVAIENT TOUS MOURIR PUISQUE LE GRAND PATRON C ETAIT LUI. SASSOU N A RIEN A VOIR AVEC L ASSASSINAT DE ANGE DIAWARA

      1. VOUS AVEZ TOUS OUBLIE QUE NGOUABI ASSUMA UN JOUR AU COURS D UN DISCOURS SA RESPONSABILITEZ SUR LA MORT DE ANGE DIAWARA.
        LES RUMEURS ET LES TRACTS DE L EPOQUE DISAIENT QUE C ETAIT LE LIEUTNANT ONDZIEL ET MOUASSIPOSSO QUI AVAIENT ASSASSINE ANGE. LE LIEUTNANT ONDZIEL QUI SE DISAIT VICTIME DE MENACE AU COURS D UN PROCES POLITIQUE QUI SE TENAIT APRES LES EVENEMENTS DECLARA QU IL N AVAIT RIEN A AVOIR AVEC LA MORT DE ANGE ET C EST APRES QUE NGOUABI MONTA AU CRENEAU POUR ASSUMER L ENTIERE RESPONSABILITE SUR LA MORT DE ANGE. LES ARCHIVES DE L EPOQUE EXISTENT. SASSOU N A RIEN A AVOIR AVEC CETTE AFFAIRE

  3. Le sort de Sassou et ses acolytes sera historique ,le peuple congolais le gardera en mémoire pour des generations. Ce monsieur est notre seul mal
    mais son temps finira par arriver.

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