Pourquoi la révolte de la jeunesse congolaise peut-elle être encouragée ?

« Quand le gouvernement viole les droits du peuple, l’insurrection est pour le peuple le plus sacré et le plus indispensable des devoirs »     ROBESPIERRE

Souvent critiquée à tort  pour sa passivité et son attitude proche de la soumission  absolue, la jeunesse congolaise est pourtant parmi les  plus instruites de la zone CEMAC. Son potentiel n’est plus à démontrer tant sa capacité à survivre dans les conditions les plus inimaginables surprennent plus d’un expert en la matière. Ce n’est pourtant pas  son point fort, c’est une jeunesse diplômée, ouverte sur  le monde et connectée à internet, mais ne trouve pas satisfaction à ses premières aspirations, malgré sa compétence : L’Emploi. Elle se laisse abuser, manipuler par des promesses fallacieuses qui leur promettent tout mais sans rien voir venir depuis 27ans. Doit-on encourager notre jeunesse à une révolte? D’aucuns diront que c’est la seule solution pour bousculer  une frange des élus claniques et toute la famille présidentielle  qui s’enrichissent illicitement au détriment de cette jeunesse à l’avenir incertain et surtout abandonné. De même, il existe d’autres pistes à explorer qui peuvent rassembler tous les congolais autour des réalisations unitaires pour tous et surtout pour le vrai changement.

Il n’est plus à démontrer que la violence ne résolve pas forcément  le  problème. Elle est source de tension et génère des sacrifices humains, cause des dégâts infrastructurels  nécessitant des ressources supplémentaires pour rebâtir ce qui a été  détruit ou rendu inopérant par l’action d’une quelconque révolte. Vous me répondrez qu’on ne fait pas une omelette sans casser les œufs. Certes l’hypothèse a déjà fait ses preuves. C’est pourquoi cette  démarche, ne devrait être que l’ultime recours lorsque toutes les possibilités ont été examinées et conclues à un mutisme insupportable de la part du pouvoir. Il n’est pas non plus une solution  à écarter d’un revers de main  dans la recherche d’une solution satisfaisante pour le peuple. Quoi qu’il en soit, le peuple congolais aspire actuellement à plus de travail et de démocratie en dépit d’une gestion tentaculaire composé de mercenaire financier du pouvoir actuel qui déstructure la société congolaise.

L’intellectuel congolais ne doit pas s’ériger en instigateur de violence pour tenter de résoudre un problème social, politique ou même humanitaire. Il doit poser les faits et proposer par des réflexions pragmatiques les solutions réalisables pour aboutir à un changement positif.  Bien que la jeunesse congolaise souffre, son taux de chômage a atteint les 67% (sources PNUD), hausse des prix, confiscation du pouvoir, pauvreté, règne sans partage depuis 27 ans, manque d’eau, d’électricité et l’insalubrité dans toutes les villes et villages du pays. La jeunesse congolaise s’adonne aujourd’hui à des activités de survie parfois peu glorieuses. Je conçois que cela soit une situation inadmissible et intolérable qui pousse certains à imaginer un réveil de la jeunesse congolaise dès lors que les ingrédients de la révolution sont présentement visibles au Congo : gestion et concentration de toutes les richesses du pays par un clan.

Qu’on ne s’y trompe pas de cible.

Cessons avant toute chose de comparer les situations, bien que présentant des similitudes  qui sont parfois loin d’une réalité ancestrale congolaise.  La crise algérienne ou Soudanaise vient de  déboucher sur un changement positif et probablement salutaire pour ces vaillants peuples avec la chute  des  anciens dictateurs qui régnaient  sans partage sur l’Algérie et le Soudan  depuis des décennies.

Les officines de l’opposition congolaise se mettent en branle pour chercher à exciter la jeunesse congolaise à un sursaut d’orgueil pour « préparer » une révolte.  C’est une aberration. Car cette opposition n’est que la main invisible du pouvoir en place. Une opposition qui a toujours servi le clan SASSOU dont il partage  les dividendes  dans les affaires juteuses et les responsabilités de la misère du peuple. Les gouvernants actuels doivent cesser avec la politique du « J’y suis, j’y reste ».

Comment peut-on suggérer le réveil d’une jeunesse que vous ne cessez vous–même de martyriser ? Combien de nouveaux militants de moins de 30 à 40 ans  avez-vous dans les directoires de vos partis ?  Vous considérez que l’âge est un critère pour se présenter à une élection ? Pourtant, cela ne doit pas être un frein. Il n’est pas non plus synonyme de bon sens, de réalisme ou de civisme. On peut être très engagé et avoir le souci de l’intérêt de son pays à 18 ans et ne pas l’avoir acquis à 60. Comme c’est le cas avec beaucoup d’entre vous. L’âge ne doit pas être une référence. Dans notre société où le sens du civisme et de la solidarité se dégrade, il faut prendre en compte toutes les bonnes volontés. Mais il se trouve que 80% des hommes politiques congolais refusent non seulement de prendre leur retraite, ayant largement démontré leurs défaillances, mais s’organisent pour réduire les chances d’accessibilité à l’emploi à des milliers de jeunes sortis des universités et d’autres écoles. Ces faits se matérialisent par leur maintien à des postes où ils y sont que peu  régulièrement présents.

Certains sont ministres, directeurs, préfets, conseillers… à vie,  D’autres cumulent les postes de professeurs d’université et de conseillers dans des ministères. On se cache devant des hypothèses d’un temps révolu comme quoi les jeunes malgré leurs diplômes manquent d’expérience. Quels sont les preuves de votre sagesse et expérience ?

Au Congo, nos élus sont plus vieux que dans le reste de la CEMAC comment l’expliquez-vous ? Certains découvrent des noms comme Florent TSIBA , BOKAMBA YANGOUMA, Henri DJOMBO, MBERI  Martin, Clément MOUAMBA   et pleins d’autres qui  sont des cumulards de l’administration publique. Ces hommes pensent-ils vraiment à  une politique de régulation d’emploi ou simplement à leur retraite ? S’il faut envisager un réveil de la jeunesse dites-vous qu’il vous concernera également pas seulement le pouvoir en place. Car le jeune qui a son BAC plus 5 et se retrouve vendeur de fripes au marché Total aimerait bien qu’on lui explique pourquoi vous occupez cinq emplois et lui doit ronger son frein au chômage et à la pauvreté ?

Pourquoi la révolte peut-elle être encouragée ?

A tous les niveaux de la structure étatique, la corruption est érigée en pratique acceptable et je dirais même « conventionnelle ». Elle n’est condamnée que du bout des lèvres mais jamais sanctionnée comme elle devrait l’être dans un pays régi par le droit et la justice. La corruption se développe également dans la vie quotidienne des «  petits congolais » qui se battent corps et âmes pour ne pas sombrer dans la misère la plus humiliante qui soit. Etre taximan à Brazzaville ou à Pointe-Noire relève d’une prouesse exceptionnelle digne de « l’homme invisible » pour échapper à l’organisation maffieuse instaurée par les policiers censés assurer la circulation. Ces derniers rackettent les pauvres citoyens moyennant 3000  à  5000  F.CFA par jour en guise de laisser passer journalier. Plusieurs plaintes ont été déposées mais jusque-là il n’y a aucune suite remarquable. L’Etat laisse de tels actes perdurer et s’accroître de jours en jours condamnant chaque jour un peu plus ces pauvres citoyens à demeurer dans la précarité. Devant la colère et la frustration le soulèvement n’est pas loin.

Comment peut-on admettre que tous les leviers de l’économie du pays soient contrôlés par une frange de courtisans et membres de la famille présidentielle. A titre d’exemple :

« La Société Nouvelle Air Congo est la propriété d’un membre de la famille de SASSOU NGUESSO. La TAC appartient à l’ancien premier ministre Isidore MVOUBA. La compagnie Equajet est entre les mains d’Edgard NGUESSO et de Jean Jacques BOUYA. Sans compte le complexe de distraction SAKANA.

Air Congo Express est la propriété de Maurice NGUESSO, frère aîné de Denis SASSOU NGUESSO. » Lettre du Continent N°663.  De même, le pétrole est géré et commercialisé par la famille de Sassou-Nguesso. Les hôtels et les boutiques de luxe appartiennent à la famille de Sassou-Nguesso.

Le trésor public est devenu leur caisse familiale puisque Claudia SASSOU peut y retirer 7 milliards et acheter un somptueux appartement  dans le complexe résidentiel et hôtelier de Donald Trump à New York, affirme l’ONG Global Witness.

De même qu’on peut citer la prolifération des entreprises d’état et le domaine foncier de l’état spoliés par ces hommes qui appartiennent tous au clan. « Désormais, ceux qui respectent la loi sont parfois moins bien  traités que ceux qui la bafouent quotidiennement. L’émergence d’un sentiment de « tribalisme social » voit le jour mettant en concurrence les Congolais non pas pour faire éclater l’excellence au travail, mais bien pour encourager la frustration et la médiocrité » (1).

Un clan qui met la main sur toutes les filières économiques du pays. Cela ne peut être acceptable. Cette situation intolérable traduit un verrouillage et une fermeture vers une  volonté d’unité et du vivre ensemble. Un clan qui fonctionne en vase clos s’érige le privilège de distiller des postes à ceux qui auront approuvé leurs méthodes dictatoriales. Ces pratiques annihilent la vision étendue de voir le Congo  comme un bien commun qu’il faut gérer avec solidarité et volonté de développement vers un changement positif pour tous.

« Le salaire minimum congolais est de 89 996 F Cfa par mois et le chômage touche 49% de la population active. Se loger, se nourrir, se vêtir et se soigner sont devenus des rêves cauchemardesques pour toute cette frange de la population. Et la situation ne va pas en s’améliorant. Selon la banque mondiale 42% des 800.000 chômeurs environ vivent aujourd’hui dans un foyer dont un seul membre travaille et touche le SMIC. Beaucoup de ses défavorisés retournent chez leurs parents pour combler le déficit et espérer joindre les deux bouts du mois »(2).

Devant ces situations difficiles et inhumaines imposées par un régime clanique corrompu, la jeunesse congolaise doit avant tout devoir compter sur elle-même.  Surtout pas à cette Françafrique qui s’indigne devant l’incendie de notre Dame de Paris mais applaudit les privations de liberté, des emprisonnements, les multiples malversations teintées de pillage organisés du Clan au pouvoir au Congo-Brazzaville. Le Congo est tellement surendetté auprès des chinois et autres traders pétroliers  qu’on arrive à de situations surréalistes  même les cadavres doivent maintenant payer les péages pour rembourser la dette. Mon Congo se meurt…..

Le Congo, aujourd’hui est riche et capable de relever les défis de l’emploi et du développement  par une bonne répartition des richesses, de l’investissement soutenu dans les secteurs porteurs comme, l’environnement, la santé, l’éducation…. Il faut instaurer une politique d’exemplarité au sommet de l’Etat par une politique de redistribution des richesses au peuple congolais. Si tel n’est pas le cas, ni votre appartenance au grand loge maçonnique, ni votre soumission à la françafrique, ni encore moins vos milliards cachés à travers le monde ne vous sera d’un grand secours.

Vous pouvez aller humilier les étudiants à travers le monde et cautionnant leur enfermement et leur embastillement cela ne montre que l’enfantillage de votre gestion du pouvoir.

Le monde démocratique vous fermera ses portes et ses aéroports car vous n’aurez été que des pantins à leur service. Aidez votre peuple tant qu’il est  temps, lui seul s’en souviendra. A ceux qui pensent que 37 ans de règne sans partage, ce n’est pas assez voire trop ; ceux qui veulent continuer le vagabondage politique  tout en méprisant la volonté du peuple congolais doivent méditer.

Jean-Claude  BERI

Activiste, lanceur d’Alerte

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