Sassou Nguesso – Clément Mouamba, le duo maso

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Le paysage politique du Congo-Brazzaville est sorti de la brume. L’exécutif est désormais bicéphale au Congo-Brazzaville. Le choix porté par Denis Sassou Nguesso sur Clément Mouamba comme premier ministre est considéré par certains comme le mariage de la carpe et du lapin. Pour d’autres, au contraire, il correspond à un subtil plan stratégique imaginé par le khalife d’Oyo.

Le bon et le méchant

En vérité, les deux visions se recoupent. Denis Sassou Nguesso, président volcanique, fougueux et téméraire face à Clément Mouamba, premier ministre débonnaire, précautionneux et accommodant. Denis Sassou Nguesso joue la figure du méchant (ce qu’il est fondamentalement) en jetant de l’huile sur le feu, en bombardant les localités de la région du Pool sous prétexte de traquer Frédéric Binsamou alias Pasteur Ntoumi et en procédant à l’arrestation des opposants. Le parcours de Denis Sassou Nguesso est jalonné d’actions violentes : assassinats de Marien Ngouabi, du Cardinal Emile Biayenda et du l’ancien président Alphonse Massamba Débat (Cf. Sassou Nguesso : L’irrésistible ascension d’un pion de la françafrique, Ed L’Harmattan, 2009).

Franc-maçon, Clément Mouamba apparait comme l’homme du dialogue engageant des pourparlers tous azimuts avec la plate-forme IDC-FROCAD par l’intermédiaire d’Elvis Digne Tsalissan Okombi, lequel exigea ; en son temps, l’éjection du gouvernement de Guy Brice Parfait Kolelas et Claudine Munari Mabondzo. Denis Sassou Nguesso exauça les vœux du patron de l’association « Pona ékolo ». Et, ce fut la délivrance pour les deux mousquetaires.

Petits meurtres

Clément Mouamba souhaite-t-il défendre une improbable voie médiane censée réconcilier deux camps qui se livrent une guerre à mort depuis l’élection présidentielle du 20 mars 2016 ? Permettez-nous d’en douter ! Clément Mouamba avale couleuvre sur couleuvre sans broncher. Or, qui ne dit mot consent. L’ultime humiliation fut la désignation de son directeur de cabinet par les proches de Denis Sassou Nguesso. Le Premier Ministre n’osa pas quitter le navire. Le poste s’avérant tellement alléchant. De manière insidieuse, Clément Mouamba, bon gré mal gré, tente de rendre les coups. Dans la déclaration de politique générale faite devant les parlementaires, Clément Mouamba a prononcé un réquisitoire implacable contre la gestion sassouiste du pouvoir. Il s’en est suivi une attaque en règle des ministres en poste contre les sortants, une sorte de « petits meurtres » entre ministres. Guerre de tranchée de Pierre Mabiala contre Aimé Emmanuel Yoka, Henri Djombo contre Rigobert Maboundou, Aimé Parfait Coussou Mavoungou contre Pierre Mabiala etc… Ancienne élève du CEG de la Paix et du lycée de la Révolution, Rosalie Matondo n’a pas eu l’outrecuidance de descendre en flèche le travail gouvernemental de son prédécesseur Henri Djombo. C’est l’exception qui confirme la règle. Est-ce pour excès de pudeur, de prudence ou pour toute autre considération? En tout cas Rosalie Matondo n’a pas daigné participer au jeu de massacres entre ministres.

Jeu de rôles

Dès que Clément Mouamba amorce des actions de dialogue en vue de décrisper le climat politique au Congo-Brazzaville, Denis Sassou Nguesso initie aussitôt des actions de sape. Il savonne la planche. Pendant que Clément Mouamba consulte les leaders de l’alliance IDC-FROCAD et les membres de la société civile, Denis Sassou Nguesso ordonne le bombardement de la région du Pool, l’encerclement des opposants et l’arrestation d’un ancien candidat à la présidentielle. L’un manie le bâton, l’autre la carotte. Pendant que Denis Sassou Nguesso excelle dans la cruauté, Clément Mouamba, lui, joue la carte de la câlinothérapie. Les deux hommes sont dans un jeu de rôle. Errare humanum est, perseverare diabolucum. Le dernier exemple en date de ce jeu est l’incarcération du général Jean-Marie Michel Mokoko, baptisé « Moïse » par ses partisans, après une assignation à domicile de plus de soixante-dix jours sans que Clément Mouamba ne s’insurge contre le traitement infligé au saint-cyrien et ancien chef d’Etat-major. Clément Mouamba continue d’encaisser les coups. Le premier ministre Clément Mouamba est-il devenu le souffre-douleur de Denis Sassou Nguesso ? Clément Mouamba découvre-t-il seulement aujourd’hui que la volonté affrichée de dialogue de Denis Sassou Nguesso flétrie au vœu de l’homme d’Edou-Penda est de mourir au pouvoir ?

Si Denis Sassou Nguesso heurte ainsi son Premier Ministre, c’est en connaissance de cause. Le khalife d’Oyo veut amener Clément Mouamba, de gré ou de force, à entrer dans une culture de violence sans laquelle Denis Sassou Nguesso n’a aucune chance de parvenir au pouvoir. La dernière élection présidentielle en témoigne. Le duo infernal Sassou-Mouamba a perdu tout lien avec le Congo-Brazzaville profond. Denis Sassou Nguesso qui brandit l’étendard de la fermeté a perdu la bataille de l’opinion et de la communication. S’il compte sur l’opération de charme engagée par Clément Mouamba pour se refaire la cerise, c’est raté.

Benjamin BILOMBOT BITADYS

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