Monsieur Jean-Jacques Serge Yhombi Opango, de la prise de conscience collective ou au pilori ?

Le débat crucial sur la responsabilité du PCT (Parti congolais du travail) sur la gestion des affaires publiques dans notre pays initié par monsieur Jean-Jacques Serge Yhombi Opango est une nécessité pour l’avenir du Congo-Brazzaville.

Monsieur Jean-Jacques Serge Yhombi Opango nous interpelle, et son appel à la prise de conscience collective est plus que jamais essentiel. Pour qu’un peuple puisse avancer et échapper aux erreurs du passé, il doit se confronter sans détour à son histoire. C’est dans cette optique que le débat qu’il soulève mérite toute notre attention, au-delà de nos émotions immédiates.

Le PCT porte une responsabilité historique incontournable dans les difficultés passées et actuelles de notre pays. Depuis l’indépendance, la vie politique congolaise a trop souvent été marquée par la violence et les drames. Il est impératif de reconnaître que la gestion du Congo-Brazzaville par le PCT s’est écartée des principes fondamentaux des droits de l’Homme et des valeurs universelles de paix, de justice, de fraternité et d’égalité.

Un peuple doit regarder en face son histoire afin d’en tirer des leçons pour un avenir meilleur, et ne plus sombrer dans l’obscurantisme.

Le PCT ne pourra se dérober de sa responsabilité historique dans la décrépitude de notre pays, car un grand pouvoir implique des grandes responsabilités devant le peuple ; être responsable c’est rendre des comptes.

Monsieur Jean-Jacques Serge Yhombi Opango a jeté un pavé dans la mare boueuse de la politique congolaise caractérisée depuis notre indépendance par de la violence politique et des crimes de sang pour accéder au pouvoir.

L’une des maximes guerrières du PCT, parti-État, n’est-elle pas : « Camarade si tu avances on te suit, si tu t’arrêtes on te pointe, si tu recules on t’abat ». Ces marxistes-léninistes convertis à la démocratie non pas par conviction mais par pur opportunisme, continuent d’infliger les affres de la faim à notre peuple.

La particularité du PCT est que c’est un parti dirigé par des militaires qui se sont emparés de la force létale légitime d’un pays en vue de contraindre d’autres citoyens ; c’est de la dictature.

Le débat que lance monsieur Jean-Jacques Serge Yhombi Opango ressemble à celui de monsieur Jean-Michel Apathie, journaliste français, sur la reconnaissance par l’État français des crimes commis par le gouvernement français en Algérie. Mais ici en ce qui nous concerne, il s’agit du gouvernement congolais sous la férule du PCT qui a brillé lors de son règne jusqu’à ce jour par des crimes économiques et des tueries de masse pour conserver le pouvoir.

« Le nazisme est irréductiblement lié à la Shoah, et dans ce contexte on ne peut pas le banaliser. Le nazisme c’est la haine du Juif et le sentiment de la supériorité de la race qu’est le colonialisme ».

Edwy Plenel dit quelque chose d’intellectuellement juste : « Le colonialisme et le nazisme ont intellectuellement parties liées ».

Au Congo-Brazzaville, le tribalisme et le nazisme ont intellectuellement parties liées, en ce sens que nous assistons tous impuissants à la supériorité de la tribu mbochi qui truste tous les postes de responsabilité sur les autres qui ne servent plus que de faire-valoir ; c’est du machiavélisme.

La comparaison que monsieur Jean-Jacques Serge Yhombi Opango établit, à l’instar du débat sur la reconnaissance des crimes coloniaux, est pertinente. Elle nous pousse à regarder en face les réalités les plus sombres de notre histoire congolaise, notamment le lien douloureux entre le tribalisme exacerbé – particulièrement la promotion d’une tribu au détriment des autres – et ses conséquences désastreuses. L’analogie avec le nazisme et le colonialisme, bien que forte, vise à souligner la gravité des dynamiques de haine et de supériorité qui ont miné notre unité nationale.

La responsabilité du PCT dans les drames qui ont endeuillés notre pays n’est plus à démontrer. Entre autres, nous avons l’assassinat de feu Président Marien Ngouabi le 18 mars 1977 imputé aux ressortissants du Pool qui subirent le châtiment suprême de la mort parce qu’uniquement ressortissants du Pool sous le Comité militaire du parti (CMP) dirigé par le général Jacques Joachim Yhomby-Opango. Pendant que monsieur Denis Sassou Nguesso prononçait les larmes de crocodile et la voix tremblotante l’oraison funèbre et funeste de son compagnon d’armes, l’histoire retiendra que la femme de ce dernier était enceinte de lui ; l’adultère constitue la pire trahison, un crime ignoble pour les frères d’armes et un déshonneur pour celui qui le commet. Les vrais liens de compagnons d’armes se forment dans la confiance mutuelle, l’honneur et non dans la trahison. C’est factuel.

L’adultère,  les relations sexuelles extraconjugales des militaires, constitue un crime selon le code militaire américain par exemple, mais pas au Congo-Brazzaville a priori.

Les ressortissants du Pool n’ont pas connu qu’un seul, mais de nombreux « Oradour-sur-Glane » perpétrés par le PCT en vue d’anéantir les cadres de ce département.

Ces mêmes méthodes de terreur sont appliquées à Owando avec l’assassinat du capitaine Pierre Anga tué en 1987. Sa traque par le régime de monsieur Denis Sassou Nguesso aurait occasionné la mort de plus de 3000 personnes. Un véritable génocide a eu lieu contre les Kouyous, un autre « Oradour-sur-Glane ».

Les 353 disparus du Beach figurent également sur le triste tableau de chasse de monsieur Denis Sassou Nguesso, sans aucune justification rationnelle sinon du fait que ces derniers soient des ressortissants du Pool.

Arrive la guerre civile sanglante du 05 juin 1997 avec ses 400 000 morts ayant permis à monsieur Denis Sassou Nguesso de reconquérir le pouvoir par la force des armes au mépris de la dignité humaine. Le département du Pool en a payé un lourd tribut jusqu’au saccage des arbres fruitiers ce qui montre l’absurdité de ce pouvoir.

Le règne actuel de monsieur Denis Sassou Nguesso est celui des inégalités sociales, de l’injustice sociale et des crimes économiques. Comment ne pas s’insurger devant tant de méfaits commis dans notre pays avec un peuple terrorisé par « le goût du sang » de monsieur Denis Sassou Nguesso ?

L’organisation anarchique de la vie politique par la sélection des partis politiques de son opposition choisie est la goutte de trop qui fait déborder le vase. Nous ne sommes plus dans une dictature, mais dans une monarchie dans laquelle le monarque a droit de vie ou de mort sur les Congolaises et les Congolais.

Ainsi, la question posée par monsieur Jean-Jacques Serge Yhombi Opango n’est pas celle du mépris, mais bien celle de la survie de notre pays en tant qu’État, et potentiellement en tant que nation. Il nous invite à une réflexion collective et profonde, loin de la pensée unique, sur ce qui nous unit plutôt que ce qui nous divise. En tant que concitoyen, et pour ma part, en tant qu’ami et frère, je partage sa vision d’un Congo uni et apaisé, libéré des haines tribales qui ont alimentées le pouvoir actuel et son parti.

C’est aussi cela le rôle des hommes politiques, des intellectuels de poser des problèmes sociétaux qui poussent à la réflexion dans un devoir de responsabilité, de vérité et d’humanité.

Les épisodes tragiques, des disparus du Beach aux guerres civiles dévastatrices comme celles du 05 juin 1997 et de 1998, en passant par les massacres ciblés, soulignent l’ampleur des souffrances infligées à notre peuple. Ces événements, ainsi que les crimes économiques et les inégalités sociales persistantes, témoignent d’une gouvernance qui a semé la terreur et divisé la nation.

C’est ensemble que nous pourrons faire resplendir à nouveau notre pays. Le débat sur la responsabilité du PCT dans la déchéance politique, sociale et morale de notre pays depuis plusieurs décennies cumulées est une étape cruciale vers la vérité et la réconciliation, indispensable pour bâtir un avenir meilleur. C’est un appel à la mémoire, à la responsabilité collective et à la rupture pour dénoncer les violences politiques cycliques, le tribalisme institutionnalisé, les crimes d’État impunis, la société inégalitaire, et la gestion clanique et militaire du pouvoir par le PCT.

Le Parti congolais du travail né avec des prétentions révolutionnaires, est aujourd’hui l’un des symboles les plus manifestes de l’échec de la décolonisation politique en Afrique centrale. De 1969 à 2025, le PCT est passé de la promesse socialiste à la prédation clanique, de l’unité nationale au tribalisme d’État, de la démocratie à la dérive autoritaire. Ce parti clanique ne pourra plus être réformé de l’intérieur car basé sur le culte de la personnalité. Sa dissolution ou sa marginalisation politique est une condition sine qua non pour reconstruire une République véritable, fondée sur l’égalité, la justice, et la mémoire des victimes.

Oublions ce qui nous divise, soyons plus unis que jamais.

Patrice Aimé Césaire MIAKASSISSA

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