Monsieur Théophile Obenga, l’Intellectuel congolais sacrifié !

À l’approche de l’élection présidentielle de mars 2026, le pouvoir en place à Brazzaville orchestre une mise en scène pour flatter ses « universitaires opportunistes ». C’est dans ce contexte que, ce 25 juillet 2025, monsieur Théophile Obenga s’est vu décerner la dignité de Grand-croix dans l’ordre du mérite congolais par monsieur Denis Sassou Nguesso.

Pourtant, connaissant la tragédie congolaise, monsieur Théophile Obenga aurait-il pu refuser cette distinction déshonorante ? Oui. Mais nous sommes face à ces universitaires qui utilisent leur savoir pour flirter avec les pouvoirs successifs, surtout ceux issus de leur région, cherchant la notoriété alors que le pays s’effondre.

Cet égyptologue, ancien ministre des Affaires étrangères, avait pourtant déclaré sur RFI le 15 août 2020, pour le 60ème anniversaire de l’indépendance, que « tant que le virus tribal n’est pas encore évacué, la paix c’est un truc factice ». Une critique cinglante lancée au visage des dirigeants tribalistes congolais. Un temps, nous avons cru à une prise de conscience, une repentance, une prise de distance de monsieur Théophile Obenga vis-à-vis de ce pouvoir scélérat. Mais non, les vieilles habitudes ont la vie dure, le tribalisme restant le moteur de la vie politique et académique au Congo-Brazzaville.

Monsieur Théophile Obenga, par sa stature nationale et internationale, aurait dû être la voix de la sagesse, des sans-voix, du peuple, pour l’établissement d’un État de droit, loin de toute connivence avec le régime actuel. Il aurait dû s’élever contre le déclin abyssal de notre système scolaire et universitaire.

Pourtant, depuis décembre 2020, il préside le comité de direction de l’Université Denis Sassou Nguesso, une institution sans rayonnement au-delà de Kintélé, sa bourgade d’implantation. Tel un pantin, monsieur Théophile Obenga a été exhibé devant le monde comme une caution universitaire pour un régime qui terrorise son peuple.

Les arrestations arbitraires des avocats et des citoyens lambda pour des coups d’État imaginaires se multiplient au Congo-Brazzaville sans la moindre réprobation des universitaires, notamment ceux issus de la communauté mbochi qui dominent aujourd’hui, sélectionnés sur des bases tribales plutôt que méritoires, comme le condamnait jadis monsieur Théophile Obenga. Face à cela, l’opposition politique et certains intellectuels restent apathiques, mus par la répression implacable du système policier.

Le constat est amer et douloureux, monsieur Théophile Obenga ne changera pas sa nature pour l’intérêt général. Pour lui, prime la reconnaissance de ses partenaires politiques. Son sourire béat aux côtés de monsieur Denis Sassou Nguesso, main dans la main, révèle la consanguinité du pouvoir politique et universitaire au Congo-Brazzaville.

Personne ne peut se satisfaire de cette dérive intellectuelle qui consiste à donner des leçons de morale à l’étranger sur la bonne gouvernance tout en acceptant le chaos chez soi. Maintenant élevé à la dignité de Grand-croix, monsieur Théophile Obenga est contraint au devoir de réserve qui incombe à ceux qui profitent des privilèges de la République.

Nous avions osé rêver que monsieur Théophile Obenga serait un intellectuel engagé pour son pays, à l’instar du « président-philosophe » tchèque Václav Havel. Mais les faits sont cruels, ils nous montrent un homme qui a choisi de ne pas voir, ni écouter, ni parler des souffrances de son peuple, préférant les lambris dorés de la République. Triste destin pour un homme qui, comme l’Égypte antique, appartiendra bientôt au passé.

Dans ce monde, rien n’est gratuit. La seule question est celle de savoir si le prix du silence d’un homme aussi éminent que monsieur Théophile Obenga est une simple breloque autour du cou, ce qui, à notre avis, n’est pas cher payé.

Monsieur Théophile Obenga, une figure « intellectuelle » aurait-il trahi ses principes et la cause du peuple congolais en acceptant une distinction du pouvoir en place ? Seul l’avenir nous le dira.

Félicitations, monsieur Théophile Obenga, pour votre ascension dans le monde des paillettes. Mais l’Histoire jugera que vous avez manqué votre rendez-vous avec le peuple congolais qui attendait tant de votre érudition.

Comme l’écrivait Stefan Zweig : « On peut tout fuir, sauf sa conscience. »

La conscience est cette lumière qui distingue le bien du mal.

Patrice Aimé Césaire MIAKASSISSA

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