Congo-Justice : un enkystement du mal jusqu’aux racines fondamentales de l’éthique ?

La question n’est pas provocatrice au regard de l’état dans lequel patauge l’appareil judiciaire congolais. Ici, la cacophonie dans la formation, l’ingérence politique et les nominations sur fond de tribalisme ou de fétichisme ont atteint un paroxysme indicible qui ne peut laisser indifférente toute personne dotée de raison et d’humanité.

De la faillite totale de la formation à l’ENAM…

Entre l’inefficacité de l’action gouvernementale et la montée exponentielle des anti-valeurs, la formation des magistrats bat de l’aile : la vocation première et intrinsèque de l’ENAM de former les magistrats n’est plus que l’ombre d’elle-même. Cette école est rongée par le prurit de la corruption. C’est moyennant des centaines de mille, voire des millions, que l’on y accède aujourd’hui. Pour les candidats, l’argent règle tout. Les carrières financières et de la magistrature sont les plus prisées. L’ENAM n’est devenu qu’un centre de corruption et de tricherie où se conjuguent droits de cuissage, marchandage des notes et tripotage des listes des admis aux examens faites en fonction de clans.

Lors de sa première tournée d’inspection il y a 15 jours à l’ENAM, le nouveau Président de l’Université Marien Ngouabi, le Pr Parisse Akouango, a dénoncé ouvertement et publiquement les pratiques en magistrature et en Finances publiques devant le précédent Directeur désormais promu Secrétaire général de l’UMNG, le Pr Rufin-Willy MANTSIE qui a cédé sous la peur et le trafic d’influence. Le ministre Bininga s’illustre particulièrement en magistrature avec des méthodes d gangster en décidant seul qui entre en stage. Un véritable Patron de la mafia qui ne s’entoure d’aucun scrupule élémentaire tellement qu’il est imbu de son « pouvoir ».

… au viol de la fonction justice par les ingérences et les injonctions

La Constitution du 15/11/2015 consacre la séparation des pouvoirs. Mais de nombreuses affaires montrent l’ingérence de l’exécutif dans d’autres secteurs. La dernière en date est l’affaire Mbéré/Airtel où le ministre-directeur de cabinet du Président de la République, Florent Tsiba, par sa lettre datée du 31 janvier 2023, demande au 1ᵉʳ président de la Cour Suprême de surseoir la décision judiciaire. En utilisant, dans ladite lettre, les termes, « sur instructions de Son Excellence Monsieur le Président de la république… » Florent Tsiba fait de Sassou Nguesso, violeur des principes de séparation des pouvoirs, et prouve que beaucoup de jugements sont rendus sur des bases subjectives par les magistrats aux ordres. De là, il n’y a qu’un pas à croire qu’André Okombi Salissa, Jean-Marie Michel Mokoko et Cie ont été condamnés injustement.

Des Nominations

Les textes régissant les Cours et tribunaux de la République du Congo sont bâtis sur le modèle français, qui exigent que les magistrats nommés à la Cour Suprême par exemple, aient une grande expérience, soient gradés, hors hiérarchie et passent d’abord par la Cour d’Appel afin de mieux apprécier les pourvois et rendre correctement les arrêts. Or, seuls Théophile Mbitsi, le magistrat – colonel -major Armel Nzoulani,  Alain Opo (par effraction) remplissent ses critères pour concourir aux postes de président, vice-président et procureur général après les préavisés Bouka et Mobanga. Modifier les règles de jeux en plein match comme on veut le faire actuellement pour privilégier le clan, en bombardant des magistrats qui n’ont pas été initiés aux techniques de la Cour Suprême et sauter la Cour d’Appel est une tricherie et grave car la justice est la jauge d’une nation.

Cacophonie à la CCDB

La situation est plus alarmante à la Cour des Comptes et de discipline budgétaire (CCDB). En effet, depuis plusieurs années, la CCDB est gérée par trois personnes très expérimentées : Charles Émile Apesse (CEA), le 1ᵉʳ avocat général, Ludovic Ngouala préavisé, mais son chef n’avait pas signé sa note de cessation de service, préférant le maintenir pour son savoir-faire. Ce dernier préside aux destinées de la CCDB depuis décembre 2024 jusqu’à ce jour. Brigitte Miyouna est doyenne et pièce maîtresse de la CCDB. Elle joue à la fois le rôle de gestionnaire et de « conseillère spéciale » entre le parquet général et le siège géré par le magistrat Emmanuel Kamba et auprès des auditeurs. Viennent par la suite les débutants, Alain Crépin Itoua Elenga, Michel Miambi, substituts généraux affectés à peine une année. Le trouble-fête, madame Milandou née Kanza Jocelyne, admise à la retraite par note n° 768/M.JDHPPA/SGJ/DAFE-SGPJSJ du 21 juillet 2020, a cessé le service le 1ᵉʳ décembre 2020 à 14h00 précise.

Conformément aux us et coutumes de la fonction publique et par note du secrétaire général de la justice du 21 juillet 2020, Jocelyne Kanza a bénéficié de l’indemnité forfaitaire dite de fin de carrière égale à six mois de traitement. Bien que retraitée et ayant reçu la note de cessation de service, curieusement, elle n’avait jamais libéré les bureaux de la CCDB depuis 2020. Au contraire, elle y revient constamment et même tardivement quelques fois pour faire des incantations avec des prieurs. Entre temps elle a eu à changer les rideaux. Ce 7 avril, à l’image du meurtrier qui revient toujours sur le lieu du crime, de même, dame Milandou-Kanza Jocelyne est descendue à la CCDB. Elle aurait déclaré que la présidence de la CCDB était son poste (à vérifier). Un jour, exaspéré, le CEA s’exclama, « Pourquoi cette dame cherche des polémiques ? ». Succéder au CEA comme cela se profile dans les officines, c’est donner raison à toutes les personnes qui pensent que, bien qu’il était naturellement malade, mais cette dernière aurait suivi les traces de Henri Bouka de précipiter sa mort. Bref, la loi n’ayant pas d’effets rétroactifs, née le 15 novembre 1955 = 70 ans en 2025, retraitée à 65 ans en 2020, si elle est nommée présidente de la CCDB, cela fera jurisprudence. Tous les professeurs d’université et divers fonctionnaires mis respectivement à la retraite avant 2022 année de relèvement de la retraite et avant la loi du 16 août 2022 et la loi n°48 – 2024 du 30 décembre 2024, devront donc revenir travailler. Chose qui discréditera de nouveau le Congo.

Certes, MM. Sassou et Collinet n’ont pas de bilan à présenter au peuple même quand ils se targuent de mener à bon terme le programme de FMI dans un pays qui est sans électricité, ni eau potable et le système sanitaire est dans la gadoue. Mais il n’est pas encore tard pour faire mieux s’ils ne trichent pas comme ils l’ont fait en recrutant les enseignants à l’université dépourvus d’expérience et de doctorats, ce qui met en difficulté le système éducatif congolais. L’adoption d’un plan Marshall aux conseils supérieurs de la magistrature et de la Cour des comptes et de discipline budgétaire pour lutter contre les anti-valeurs s’avère impérieuse. Oui, nous parlons de ACM, le second premier ministre le plus puissant après André Milongo mais… (nous y reviendrons sans oublier les résultats de notre enquête sur les Églises, la franc-maçonnerie, la suite du dossier judiciaire, etc.).

Ghys Fortune BEMBA DOMBE

Laisser un commentaire